241 A 1, article de la Revue Générale des Chemins de Fer de février 1926

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Titre

Locomotive 241 A 1 compound à grande vitesse avec surchauffeur de vapeur, à quatre essieux couplés, à roues de 1,800 m, bogie à deux essieux à l’avant et essieu porteur à l’arrière de la Compagnie PLM par M. R. Vallantin, Ingénieur en chef du matériel et de la traction

Planche et figures de l’article

Préambule

La Compagnie PLM a mis en service en Février 1925, une locomotive à quatre essieux accouplés, à roues de 1,800 m, placés entre un bogie à l’avant et un bissel à l’arrière. Cette locomotive (Figure 1) a été désignée 241 A 1.

Le parcours qu’elle a fourni était, au 1er janvier 1926, de 34 658 kilomètres. Les résultats qu’elle donne sont bien ceux qu’on escomptait. L’intérêt d’étudier une unité de ce type est apparu au PLM au cours du deuxième trimestre 1921.

L’effectif des locomotives 231 (Pacific) étant, à ce moment, un peu insuffisant, on avait été conduit à utiliser des locomotives 141 (Mikado) pour la remorque, entre Paris et Dijon, de certains express lourds. Ces 141 ont des chaudières identiques à celles des 231. Leur poids adhérent est de 70 tonnes, supérieur de 14,500 t à celui des 231. Le diamètre de leurs roues motrices est de 1,65 m. Les diamètres de leurs cylindres et les courses de leurs pistons sont donnés dans le tableau 1 en regard de ceux des 231.

On put se rendre compte, au cours de la remorque de ces express lourds, ayant d’assez nombreux arrêts, que les 141 avaient, pour les reprises de vitesse, une supériorité très marquée sur les 231, surtout en rampe, et que cette supériorité devait être attribuée plus encore à leur poids adhérent qu’à leurs plus gros cylindres. On constata d’autre part qu’elles pouvaient soutenir et même dépasser la vitesse de 90 km/h. Cela établissait que l’emploi de quatre essieux couplés n’était pas incompatible avec la réalisation de grandes vitesses. On en conclut qu’on pouvait parfaitement envisager la construction d’une locomotive 241 qui donnerait, en palier, à très peu près, la même vitesse qu’une 231, mais posséderait, du fait de son essieu moteur supplémentaire, une adhérence qui fait incontestablement défaut aux 231 pour les reprises de vitesse surtout en rampe.

Or, les seize rapides mis en marche chaque jour dans la soirée, au départ de Paris, se suivent à des intervalles très rapprochés. Le graphique Figure 2 donne, pour le service d’hiver 1925-1926, le tracé de la marche .de ces 16 trains. Leur passage en gare des Laumes a lieu entre 23h00 et 02h40, avec des espacements variant de 9 à 18 minutes. Ils doivent ensuite franchir une rampe de 31 km qui sépare cette gare de celle de Blaisy.

Dans le sens pair, entre 0h30 et 5h10, les seize rapides de retour partent de Dijon et ont à monter une rampe de 8 mm de 26 km de longueur. Leur circulation s’effectue en deux groupes séparés par un intervalle de 55 minutes. Le 2ème groupe, formé de 10 trains, est particulièrement dense puisque l’intervalle moyen n’est que de 11 minutes.

Il est donc essentiel qu’à la durée d’un arrêt imprévu de l’un de ces rapides sur la rampe, ne vienne pas s’ajouter une perte de temps, conséquence d’une reprise de vitesse trop longue, sinon toute la circulation se trouve presque immanquablement gravement perturbée.

Le PLM demanda, en conséquence, à l’OCEM d’entreprendre l’étude d’une 241.

L’avant-projet que l’OCEM élabora tout d’abord prévoyait que la locomotive serait à simple expansion, à surchauffe, avec deux cylindres de 0,660 m de diamètre et 0,700 m de course. Le timbre de la chaudière devait être de 14 kg.

Mais sur ces entrefaites prenaient fin une série d’expériences qui avaient été mises en route six mois plus tôt dans le but de comparer ce que donnaient, en service courant, des locomotives à surchauffe, les unes compound, les autres à deux cylindres et simple expansion, mais dont les autres dispositions et les puissances étaient très analogues.

Les résultats de ces expériences étaient si nets, au triple point de vue de la consommation de combustible, de la stabilité en route et de la douceur en marche, au très grand avantage des compound, qu’il ne pouvait plus être question, pour nous, d’admettre que la 241 à construire fût à simple expansion.

Le PLM pria donc l’OCEM d’abandonner son premier projet et d’étudier en remplacement une 241 compound. Il indiqua les dimensions et dispositions à adopter pour ses principaux éléments.

Cylindres

Il fut spécifié que les cylindres devaient avoir les mêmes dimensions que ceux des locomotives 141. Comme il a déjà été rappelé plus haut, les diamètres des cylindres HP est de 0,510 m, celui des cylindres BP est de 0,720 m. La course des pistons HP est de 0,650 m et celle des pistons BP de 0,650 m.

En raison de leur très gros diamètre, les cylindres BP durent être placés à l’extérieur des longerons comme sur les 141. Ils sont au droit du bogie, et les bielles BP attaquent le premier essieu moteur.

L’OCEM proposa de placer les cylindres HP assez en arrière des cylindres BP, et assez haut pour que les bielles HP puissent attaquer le 2ème essieu moteur, en passant par dessus le premier. De cette façon, le premier essieu moteur est un essieu droit et non pas un essieu coudé, ce qui est, en effet, très important pour une locomotive de cet empattement et de ce poids.

Chaudière

La chaudière a une grille de 5 m2. Sa boîte à feu comporte une chambre de combustion dont la profondeur est de 1,200 m. Les petits tubes à fumée sont des tubes lisses de 55 x 50, d’une longueur de 5,98 m.

Le surchauffeur est constitué par 40 éléments en tubes de 28 x 35, placés à l’intérieur de gros tubes de 125 x 133. A l’origine, les éléments surchauffeurs étaient en tubes de 31 x 38. Ils devaient obturer exagérément les gros tubes dans lesquels ne passaient pas assez de gaz chauds pour que la surchauffe fût suffisante. Elle est maintenant plutôt exagérée.

Mouvements de distribution

Le tiroir de chacun des cylindres extérieurs est commandé par un mouvement de distribution Walschaert complet (Figure 3). Chacun des deux tiroirs intérieurs est commandé par un levier d’avance. L’extrémité inférieure de ce levier est entraînée comme à l’ordinaire par la tête du piston. Son extrémité supérieure n’est pas entraînée par le mouvement d’une coulisse propre. Elle est reliée au bras d’un petit arbre transversal qui oscille autour de son axe et dont les oscillations sont solidaires, grâce à un renvoi de mouvement convenable, de celles de la coulisse extérieure voisine.

Cette solution pour la commande des tiroirs intérieurs, actuellement appliquée sur un millier de locomotives PLM, constitue une simplification considérable du mécanisme intérieur des locomotives compound et un gros allégement de poids. Elle permet, d’autre part, de recourir pour l’essieu coudé à la forme dite en z, ou à telles autres formes analogues, qui sont beaucoup plus favorables à la conservation de cet essieu que les formes anciennes auxquelles on était obligé de se tenir pour pouvoir loger des poulies d’excentriques.

Elle permet enfin de n’avoir qu’un arbre de relevage et, par suite, la disposition du changement de marche est aussi simple que celle d’un changement de marche de machine à simple expansion.

Le réglage de la distribution est tel qu’à une admission aux cylindres d’admission de 50 % correspond une admission de 63 % aux cylindres de détente.

L’admission maximum aux cylindres d’admission est de 75,2 %. Elle est de 85,3 % aux cylindres de détente.

Il n’y a pas de différence fixe entre les admissions relatives HP et BP, ainsi qu’il résulte du tableau T 2 :

Bogie – Bissel

Ils sont identiques, à quelques détails près, à ceux des locomotives 231. Leurs jeux latéraux sont respectivement de 0,061 et 0,096 m.

Suspension

Pour régulariser la répartition des charges sur les quatre essieux accouplés, leurs suspensions sont conjuguées à l’aide de balanciers. La suspension du bogie, de même que celle du bissel, ne sont pas conjuguées avec celles des essieux accouplés.

Freinage

Les essieux du bogie et les quatre essieux accouplés sont munis de sabots de frein. La timonerie qui commande les sabots des essieux accouplés est entièrement distincte de la timonerie qui actionne les sabots du bogie. Le rapport de l’effort des sabots au poids sur rail est de 66 %, quand les sabots sont à mi-usure.

Détails

Soupapes de sûreté

Les soupapes de sûreté de la chaudière, au nombre de deux, sont à charge directe et sont placées sur le corps cylindrique.

Régulateur

Le régulateur est à soupape à double siège.

Echappement

L’échappement est à trèfle donnant trois jets séparés de sections variables.

Alimentation

L’alimentation est assurée au moyen de deux injecteurs type U-4, fixés au châssis, en dessous du tablier.

Graissage

Le graissage des cylindres est assuré par un graisseur à condensation à cinq départs, un départ pour chaque boîte à vapeur, le 5ème départ assurant le graissage du petit - cheval de la pompe à air.

Sablière

La sablière est à vapeur du type Gresham. Le sablage s’effectue sur deux essieux à l’avant et un essieu à l’arrière.

Chauffage par la vapeur

La locomotive porte une prise de vapeur pour le chauffage du train.

Eclairage électrique

La locomotive est éclairée électriquement au moyen d’un groupe turbo-dynamo. Cet éclairage est appliqué aux lanternes d’avant de la locomotive, aux lanternes d’arrière du tender et aux lanternes d’abri de la locomotive.

Tender

Le tender qui est accouplé à la locomotive 241 A 1 est du type à deux bogies à deux essieux chacun, et peut porter un approvisionnement de 30 m3 d’eau et de 7 tonnes de combustible. Son poids total, en ordre de marche, est de 64.700 kg.

Essais

Nous avons reproduit (Figures 4 et 5) le relevé graphique de la marche de deux trains remorqués par la machine 241 A 1, le 16 Mars 1925, alors qu’elle n’avait encore parcouru que 1 500 kilomètres : train N° 101 de Laroche à Dijon et train N° 514 de Dijon à Laroche.

Le train express n° 101, qui comporte des arrêts fréquents, avait une charge de 571 tonnes, supérieure de 10 % environ à la charge offerte par une 231. Il a été constaté que, malgré cette charge, les reprises de marche se sont faites avec une très grande rapidité. La vitesse de 80 km/h a pu être constamment tenue sur la rampe qui existe entre Les Laumes et Blaisy. Après un arrêt en pleine rampe de 8 mm par mètre, la vitesse de 60 km/h a pu être atteinte après un parcours de 3 km.

Au train 514, composé de 572 tonnes, la rampe de 8 mm qui sépare Dijon de Blaisy-Bas a été franchie très facilement.

Entre Blaisy et Laroche, la machine 241 A 1 a pu, avec ses roues de 1,800 m de diamètre, soutenir aisément une vitesse comparable à celle obtenue avec nos 231, qui ont des roues de 2,000 m. C’est un résultat très intéressant, qui s’est confirmé par la suite, et qui nous montre que, comme nous l’avions escompté, les 241 A conviendront bien pour assurer avec régularité les trains express et rapides lourds sur la section Laroche-Dijon dans les deux sens.

Le train 514 en question a eu à circuler ce jour-là derrière le train 12, dont le tonnage était de 495 tonnes. Ce dernier train, qui était en retard, était remorqué par une 231, conduite par un bon mécanicien qui a fait donner à sa machine tout ce dont elle était capable.

Le relevé graphique de ce train est reproduit (Figure 6) sous le relevé du train 514. Leur rapprochement met bien en évidence la grosse supériorité de la 241 sur la rampe de 8 mm et son équivalence sur le reste du parcours, nonobstant ses roues de 1,800 m.