25 juillet 1921, Hold-up meurtrier dans un train près de Chagny

De WikiPLM
Révision datée du 31 mars 2019 à 12:53 par FanaPLM84 (discussion | contributions) (Circonstances de l’incident)
Aller à : navigation, rechercher

Circonstances de l’incident

  • Des bandits masqués attaquent le rapide de Nice.

Ils dépouillent les voyageurs, et tuent l’un d’eux, qui résistait.

Un attentat qui dénote une audace peu commune de la part de ses auteurs, a été commis cette nuit, en chemin de fer, sur la grande ligne Marseille-Paris, près de Chagny. Des bandits masqués ont brusquement surgi dans une voiture de 1re classe du train 5, et revolver au poing, ont rançonné les voyageurs; L’un d’eux, un élève de l’École Polytechnique, qui refusa d’obtempérer à l’ordre de vider ses poches, fut tué net par lés bandits.

Haut les mains ! Il était près de deux heures. Les voyageurs de la voiture de 1er classe,du train 5, précédant immédiatement le fourgon de queue, dormaient paisiblement. Brusquement, les portières furent ouvertes, les lumières dévoilées, et, dans le couloir du wagon, trois hommes masqués apparurent, revolver au poing : "Haut les mains !", crièrent-ils. Les voyageurs, terrorisés, obéirent. Des femmes sa trouvèrent mal. Un tumulte suivit, "Videz vos poches !", ordonnèrent les bandits. Le meurtre.

Les voyageurs s’exécutèrent. Cependant, l’un d’eux, M. Max Carabellis, élève à l’École Polytechnique, habitant 18, rue Lhomond, à Paris, refusa d’obéir et menaça d’actionner le signal d’alarme. Alors les bandits, craignant qu’il ne mît sa menace à exécution et voyant, au sur plus, que M. Carabellis était le seul à protester, l’abattirent, à coups de revolver. Puis, ayant raflé argent et bijoux, ils actionnèrent eux-mêmes le signal d’alarme. Le train ralentit aussitôt. La gare de Chagny était proche. Les bandits, tranquillement, ouvrirent les portières dé sortie à contre-voie. Lorsque la vitesse fut suffisamment réduite, pendant que l’un d’eux braquait toujours son arme dans le couloir, les deux premiers limitèrent. Puis, rapidement, le dernier s’enfuit à son tour.

L’enquête. Le rapide était alors à environ un kilomètre et demi de la gare de Chagny. Il s’arrêta. Le chef de train pénétra dans le wagon assailli, et découvrit le cadavre du polytechnicien entouré des voyageurs affolés. Aussitôt prévenus par la gare de Chagny, le parquet et la gendarmerie se mirent en campagne. Jusqu’à présent aucun indice sérieux n’a été découvert. Un voyageur du wagon attaqué prétend que les bandits sont montés en gare de Dijon, mais rien n’est moins certain. La nouvelle de cet attentat a soulevé une émotion considérable parmi les autres voyageurs du train. Les coups de revolver n’ont pas été en tendus par les occupants des autres wagons, ni par le chef de train. L’enquête continue.

Nouveaux détails: D’après des renseignements complémentaires de l’enquête, un deuxième voyageur a voulu se défendre et a été blessé grièvement. Il a été transporté à l’hôpital de Chagny.

Journal L'Intransigeant du 26-7-1921 (Collection BNF-Gallica)


  • Les trois masques, le rouge, le noir et le jaune courent toujours.

L’attentat commis l’avant-dernière nuit par trois bandits masqués dans le rapide Paris-Marseille est le premier de ce genre qu’on ait enregistré sur le vieux Continent jusqu’à présent. En effet, seuls les voyageurs des trains américains avaient eu de ces mauvaises surprises. L'enquête officielle ouverte n’a, jusqu’à présent donné aucun résultat nouveau. Le wagon où s'est déroulée l’audacieuse tragédie est la voiture 17—1—789. Elle a été « différée » à Chagny. Et les scellés ont été apposes sur toutes les ouvertures du wagon. On est étonné que le long hurlement, du sifflet d'alarme n’ait pas amené les voyageurs du train, ainsi que le chef de train et les contrôleurs, soit aux portières du wagon, soit dans le wagon lui-même, par les couloirs de communication. Cette indifférence ne peut ’expliquer que par le fait que tout le monde devait dormir et a confondu le signal d’alarme avec le sifflet ordinaire de la locomotive. Un ingénieur des chemins de fer à qui nous parlions de la sécurité dans les trains nous a répondu : "— Les wagons munis de couchette ont seul un surveillant qui passe la nuit dans le wagon. Pour les autres compartiments de première classe il n’y a guère que le contrôleur qui est chargé de faire une ron- de de temps en temps, mais il est évident qu'il ne passe pas sa nuit à circuler dans les couloirs._Il se repose parfois. Dans les trains américains, chaque wagon possède un surveillant nègre. Remarquez toutefois que cela n’empêche pas que les attentats de ce genre soient beaucoup plus fréquents en Amérique que chez nous". Dès qu’il a été informé de l’attentat, le ministre des Travaux publics, actuellement retenu, au Havre par la Grande Semaine maritime, s’est fait inscrire au domicile de la malheureuse victime, M. Max Carabelli. Il a en outre donné des ordres immédiats pour que l’on entreprenne l’étude de moyens antes à sauvegarder, davantage la sécurité des voyageurs. On pourrait en effet, soit armer les contrôleurs, soit armer les chefs de trains. L'enquête continue. Ajoutons que M. de Moro-Giafferi député a écrit ce matin, au ministre de la Guerre, pour lui demander que l’on décore à titre posthume, le lieutenant Carabelli, tué dans l’audacieux attentat du rapide de Paris-Marseille. Le député de la Corse demande, d’autre part, que le capitaine Morel, du 35e d’aviation, qui a assisté à cet assassinat sans prêter main-forte au lieutenant Carabelli, soit traduit devant une commission d’enquête.

Le récit du capitaine Morel. Lyon, 26 juillet. — M. Morel, capitaine au régiment d’aviation à Lyon, était dans le compartiment même du malheureux lieutenant Carabelli. Voici le récit qu’il a l'ait du crime : Depuis Paris, le lieutenant Carabelli, que je ne connaissais pas d’ailleurs, et moi, occupions à nous seuls un compartiment de la dernière voiture. Nous dormions en face l’un de l’autre lorsque noms fûmes éveillés par le cri de : « Haut les mains !».“ Un homme d’un mètre 55 environ, plutôt râblé, le visage caché par un loup noir prolongé d’une dentelle dé pareille couleur et la tête coiffée d’une étole noire était devant nous, un pied sur chaque banquette, un revolver dans chaque main. « Haut les mains ! répétait-il. Vos portefeuilles. » Mon voisin, le lieutenant Carabelli saisit les mains du bandit, mais un deuxième individu masqué de jaune et un peu plus petit de taille apparut brusquement et donna un coup de couteau sur le bras de mon camarade, lui faisant lâcher prise. De sa main devenue libre, le malfaiteur fit feu sur le courageux officier en lui disant : « Tu payes pour la Société qui est mal faite«. L’autre revolver me tenait en respect. Le troisième bandit masqué dé rouge faisait le guet dans le couloir. Je n’avais pas d’arme. Que faire ? Je remis son portefeuille ou plutôt l’un de mes deux portefeuilles, le moins chargé, en billets de banque naturellement. Les bandits avant disparu, je me dirigeai vers le fourgon de queue dans l’intention de chercher un revolver auprès du chef de train. Je n’en eu pas le temps. Le temps stoppa. Je vis les trois hommes sauter sur le ballast et s’enfuir au pas gymnastique. En passant près de moi, ils me dirent quelques mots que je ne compris pas. Entre temps, j’avais prié un élève de l’École de Santé d’aller donner ses soins au lieutenant Carabelli qui ràlait dans notre compartiment.

Journal L'Intransigeant du 27-7-1921 (Collection BNF-Gallica)


Photos et cartes postales

Croquis et plans