Article de la Revue Générale d'Architecture de 1862: généralités sur la ligne de Paris à Lyon

De WikiPLM
Aller à : navigation, rechercher

Distribution des gares d'importances diverses, sur la ligne de Paris à Lyon

  • Nous sommes entrés déjà, au sujet de la distribution des gares d'importance diverse, sur la ligne de Paris à Lyon, dans quelques considérations générales qui s'appliqueraient également à toutes les lignes de chemin de fer. Nous ne croyons pas sortir du cadre de la Revue d’architecture en y ajoutant quelques développements nouveaux.


  • Quelque irrégulière que paraisse, au premier abord, la distribution des lieux habités d'importance correspondante, sur le sol d'un grand pays, on s'aperçoit cependant, en y regardant de plus près, que cette distribution, sous l'influence même des causes multiples qui ont présidé au groupement des populations, est soumise à certaines lois. Si l'on embrasse d'un coup d'oeil la carte de France, n'est-on pas frappé de l'équidistance presque complète que présentent des villes importantes de l'ordre d'Orléans, Chartres, Évreux, Caen, Alençon, Le Mans, Blois, Tours, Angers, Nantes, Laval, Rennes, Poitiers, Niort, Angoulême, Limoges, Châteauroux, Nevers, Moulins, etc., etc.? C'est à tel point que, si l'on réunissait ensemble ces villes par des lignes droites, on aurait couvert la carte de France d'un réseau de triangles presque tous équilatéraux. Si quelques villes échappent à cette loi, si Lyon et Saint-Étienne, par exemple, si Rouen et le Havre sont plus rapprochés l'un de l'autre que ne le comporte l'importance relative de ces centres populeux, cela tient à des circonstances spéciales que les données géographiques ou industrielles expliquent facilement.


  • Si l'on poursuivait la recherche que nous venons d'esquisser, et qu'on l'étendît aux centres habités de moindre importance, on serait étonné de voir, malgré de nombreuses anomalies, se dégager de l'ensemble une loi de distribution infiniment plus régulière qu'on ne serait porté à le croire sur un examen superficiel. Si l'on examine, à ce point de vue, la ligne de Paris à Lyon, et que l'on prenne la série des villes de plus de dix mille âmes traversées ou desservies, on trouve, en faisant entrer dans la série la ville d'Auxerre qui, par des raisons de tracé, n'est desservie que par un embranchement, le tableau des distances suivant :
    • Paris : 0 km
    • Melun : 45 km
    • Sens : 68 km
    • Auxerre : 60 km
    • Dijon : 142 km
    • Chalon : 68 km
    • Mâcon : 58 km
    • Lyon : 71 km


  • Ce tableau montre qu'à l'exception de deux anomalies, dont il serait facile d'indiquer les causes, les distances des principaux centres traversés ou desservis oscillent entre 58 et 71 kilomètres, et se rapprochent de 65 kilomètres comme moyenne. Cette loi de distribution, qui deviendrait bien plus frappante encore, si l'on étendait la présente recherche à l'ensemble de nos voies ferrées, explique déjà comment il se fait que les gares d'importance correspondante

soient échelonnées avec une certaine régularité sur une ligne donnée. Toutefois des circonstances spéciales, tenant à des considérations techniques d'exploitation, altèrent forcément, dans la pratique, la distribution qui se déduirait de l'importance seule des lieux habités.


  • Ainsi la ligne de Paris à Lyon, dont l'étendue est de 512 kilomètres, devant être partagée en six grandes sections, pour des motifs se rattachant à l'alimentation des machines, on choisit, pour premier point d'arrêt, en partant de Paris, Montereau, localité de peu d’importance, mais où se trouvait l'origine de l'ancien embranchement de Montereau à Troyes, aujourd'hui absorbé en partie par la ligne de Mulhouse. Ce point arrêté, il y avait à placer un dépôt entre Montereau et Dijon, séparés par 236 kilomètres. Tonnerre, ville peu considérable, mais qui avait l'avantage de partager cette distance eu deux moitiés parfaitement égales, dut à cette circonstance le choix qu'en firent les ingénieurs.


  • Au delà de Dijon, Chalon et Mâcon, par leur situation et leur importance, se trouvaient naturellement désignés, d'autant plus qu'à Chalon devait être placé le point d'émergence d'un embranchement sur Dôle, et qu'à Mâcon devait se faire la bifurcation conduisant à Genève et Turin.


  • Si l'on descendait dans des détails plus minimes, on trouverait encore que les gares exceptionnelles sont distribuées, sur la ligne, à des distances variables entre 46 et 26 kilomètres. On ne verrait d'exception à cette règle que pour l'intervalle compris entre Melun et Montereau, qui, quoique n'étant que de 34 kilomètres, contient la gare exceptionnelle de Fontainebleau. Il est visible que, dans cette répartition, c'est à des nécessités de service que les ingénieurs ont obéi. Ils ont pu cependant, presque partout, placer les gares importantes près de localités assez considérables. Ils ont néanmoins dû déroger à cette règle pour la station de La-Roche-sur-Yonne, qui n'est guère qu'un village, mais où la bifurcation de l'embranchement d'Auxerre créait des nécessités spéciales de service, et pour la station de Verrey, placée à distance égale entre Montbard et Dijon, et que sa position, sur la longue rampe qui précède le souterrain de Blaizy, désignait pour un dépôt de machines.


  • De ces indications il ressort que deux ordres de considérations influent sur le développement que reçoit chaque station d'une ligne : ce sont, d'une part, les nécessités techniques du service, de l'autre, le plus ou moins d'importance des localités desservies. Des dépôts de machines, des réservoirs d'alimentation, avec leurs grues hydrauliques, des voies de garage plus ou moins étendues, correspondent au premier groupe de considérations. Des bâtiments de voyageurs et des halles à Marchandises plus ou moins développées, et des remises à voitures, sont au contraire la conséquence des considérations du second groupe. Dans chaque cas particulier, ces deux ordres d'influences viennent agir avec des poids différents. Aussi ne peut-il y avoir, sur une lune donnée, de types de stations nettement déterminées dans toutes leurs parties.


Toutefois la notion de types de diverses classes est généralement admise dans la pratique. On y introduit seulement les dérogations rationnelles que chaque cas commande ou comporte.