Bulletin PLM N° 19 de janvier 1932 : Consolidation d’une culée de viaduc fondée en terrain instable

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Consolidation d’une culée de viaduc fondée en terrain instable par M. Fonlupt, Ingénieur, Chef du 7ème arrondissement de la Voie.


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La ligne de Longeray à Divonne, ouverte à la circulation en 1899, franchit, entre les gares de Collonges et de Paradis, le ravin dit du Grand-Echaud par un viaduc de 120 m d’ouverture en trois travées métalliques.


Le lit de ce torrent est creusé dans des terrains glaciaires constitués sur de très grandes épaisseurs par des couches d’argiles séparées entre elles par des filons de sablon très fin.


Ces terrains fortement inclinés vers le Rhône, qui coule à leur pied, sont en mouvement sur de nombreux points et, dès 1905, on constatait un déplacement de la culée côté Collonges de l’ouvrage du Grand-Echaud.


Des observations périodiques montrèrent qu’il s’agissait d’un mouvement très lent et l’on pouvait espérer une stabilisation. Mais vers 1927, des fissures s’amorcèrent dans le parement de la culée, l’amplitude totale du mouvement atteignant alors 0,38 m environ. La consolidation de la culée s’imposait.


La construction de cette culée avait nécessité d’importants travaux de consolidation et de fondation. Le rocher se trouvant à 60 ou 70 m de profondeur, le niveau des fondations fut arrêté à 23 m sur des argiles sèches et compactes. Pour permettre, dans un terrain de cette nature, l’ouverture des fouilles larges et profondes nécessaires pour les fondations, il avait fallu au préalable assainir les abords par un réseau de galeries souterraines.


La consolidation d’une culée établie dans de semblables conditions représentait un problème délicat qui fut résolu de la façon suivante : le renversement de la culée étant la conséquence de la poussée des terrains supérieurs sur le pylône de 23 m constituant sa fondation, un contrefort souterrain (figure 1), construit du côté opposé à la poussée, s’appuyant sur la culée et conçu pour résister, à lui seul, à la poussée des terres sur les maçonneries, devait arrêter ces mouvements.


Pour ne pas causer de désordres dans les couches de terres environnant la culée, ce contrefort devait être fondé aussi loin que possible de la culée et plus profondément.


Pour répondre à ces conditions, on a adopté le contrefort en forme d’arc de la figure 2 orienté suivant le sens du glissement des terres du coteau.


Le contrefort réalisé est un bloc monolithe de béton de ciment à base très large pour réduire les pressions unitaires sur le terrain, la surface des fondations est inclinée du côté de la poussée. Le contact du contrefort et de la culée est réalisé par un voussoir en béton armé formant clé qui s’appuie sur une dalle également en béton armé solidement ancrée dans la culée.


Le contrefort devant s’appuyer sur la culée sans y adhérer, des dispositions spéciales des surfaces de contact permettent les mouvements relatifs des deux massifs sans risque de détérioration des maçonneries.


La réalisation de ce projet comportait de nombreux aléas en raison de l’instabilité des terrains et de la nécessité de n’apporter aucun trouble dans l’équilibre des terres aux abords de la culée. Il était notamment impossible d’ouvrir en grand les fouilles nécessaires à la construction d’un seul jet de l’ensemble de l’arc monolithe.


Des travaux d’assainissement ont été exécutés au préalable. Les eaux de ruissellement des terrains supérieurs ont été captées par des fossés appropriés et 180 m de galeries visitables ont été réalisés.


  • Les travaux de l’arc ont été ensuite exécutés dans l’ordre suivant (figure 3) :
    • Fonçage d’une grande fouille pour l’établissement de la base du contrefort, avec galeries latérales pour réaliser l’épanouissement de la surface des fondations, simultanément avec l’exécution des fouilles ci-dessus, ouverture de la fouille de tête contre la culée pour exploration des maçonneries et préparation de la surface d’appui sur la culée,
    • Confection de la maçonnerie de béton de la partie de l’arc s’inscrivant dans la grande fouille et des galeries latérales;
    • Fonçage de la fouille intermédiaire et achèvement de la maçonnerie de l’arc,
    • Confection du voussoir de tête en béton armé.


Dès le début du travail, alors que la grande fouille n’était qu’à 2m de profondeur, on s’aperçut qu’elle se déplaçait en grand avec ses boisages.


On fut alors conduit à exécuter d’abord un puits plus petit en A (figure 4) puis à remplir ce puits de béton riche armé de vieux rails. Le pilier ainsi constitué servit d’arrêt aux boisages de la grande fouille.


L’ensemble des travaux a pu, dans la suite, être réalisé sans nouvel incident.


Une galerie de visite a été aménagée pour permettre d’accéder à la partie supérieure des surfaces de contact du contrefort et de la culée, où un dispositif de repérage permet de déceler les déplacements relatifs de la culée et du contrefort.


Depuis l’achèvement des travaux en juillet 1930, aucun mouvement n’a été observé.