Bulletin PLM N° 22 de Juin 1932 : Les Transports et entrepôts frigorifiques sur le PLM

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Les Transports et entrepôts frigorifiques sur le PLM par M. Paul Faralicq, Directeur Général de la Société Française de Transports et Entrepôts Frigorifiques (STEF)

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La Société Française de Transports et Entrepôts Frigorifiques (STEF), poursuivant son programme d’équipement frigorifique, a mis récemment en exploitation à Toulon, un grand entrepôt frigorifique, ce qui lui a permis d’organiser immédiatement des services de wagons frigorifiques pour le transport des fleurs et des fruits de la Côte d’Azur sur Paris.


Nous saisissons cette occasion pour présenter aux lecteurs du Bulletin PLM quelques précisions sur l’activité de la STEF.


Entrepôts et wagons frigorifiques

Entrepôts frigorifiques

Avant la guerre, la France ne possédait qu’un très petit nombre d’entrepôts frigorifiques, ayant réellement quelque importance. En utilisant les chambres froides de quelques abattoirs modernes et des fabriques de glace, elle pouvait tout au plus emmagasiner quelques milliers de tonnes de denrées périssables.


Pendant la guerre, dans le but de conserver les viandes congelées et autres denrées importées de l’étranger, notamment d’Amérique, pour le ravitaillement des armées et de la population civile, ces installations furent augmentées sensiblement et la capacité d’entreposage portée à 30 000 t, dont 16 000 t pour les régions desservies par la Compagnie PLM. Ce chiffre de 30 000 t était encore bien faible, si on considère que l’Angleterre, à ce moment-là, possédait déjà des entrepôts frigorifiques atteignant, dans l’ensemble, une capacité de 200 000 t.


Après la guerre, dans le but de permettre la reconstitution de notre cheptel national, les importations de viandes congelées continuèrent jusqu’à concurrence de 80 000 à 100 000 t par an, qui furent partagées principalement entre les ports du Havre, de Dunkerque, Marseille et Bordeaux.


Cette viande était destinée non pas à être vendue immédiatement aux détaillants, mais à être conservée afin d’être livrée méthodiquement à la consommation, ce qui devait avoir pour effet de régulariser les cours de la boucherie. Dès lors, s’imposait la nécessité d’avoir, dans les ports de débarquement et dans les principaux centres de consommation, de vastes entrepôts frigorifiques destinés à l’entreposage non seulement des viandes importées, mais encore des denrées périssables nationales telles que viandes fraîches, beurres, fromages, oeufs, poissons, fruits et légumes, etc.


Comme conséquence, un nouveau programme de construction d’entrepôts frigorifiques fut réalisé, qui porta la capacité d’entreposage à 60 000 t environ dont 20 000 t pour le seul Réseau PLM.

Wagons frigorifiques

Enfin, pour transporter la viande, ainsi, d’ailleurs, que les produits congelés, entre les ports et les lieux de consommation, il fallait avoir des wagons spéciaux, bien isolés, assurant la conservation des denrées durant le transport.


Avant la guerre, les ressources de tous les Réseaux français en wagons frigorifiques, y compris les wagons particuliers, étaient modestes puisqu’elles ne dépassaient pas 360 unités.


Pendant la guerre, elles s’accrurent d’une façon importante du fait que le Ministère de la Guerre fit transformer en wagons isothermes un certain nombre de wagons ordinaires des Réseaux, dont 666 wagons PLM du type ayant servi jusque-là au transport des primeurs, et fit l’acquisition aux Etats-Unis de 1 200 wagons isothermes ou réfrigérants à bogies.


A la fin de la guerre, ce parc spécial comprenait environ 2 200 wagons frigorifiques.


Depuis cette époque, le parc des wagons frigorifiques a atteint le chiffre d’environ 3 000 wagons, dont 1 100 exploités par la STEF.

Constitution de la STEF

  • La Compagnie PLM, soucieuse de constituer rapidement un outillage frigorifique en rapport avec les besoins de son trafic, décida, après la guerre, de confier à une Société filiale le soin de :
    • Exploiter, en le développant, son parc de wagons spéciaux,
    • Construire des entrepôts frigorifiques sur les principaux points du Réseau.


Cette solution était la plus rationnelle, car elle permettait de tirer le meilleur parti possible du matériel existant.


C’est ainsi qu’est née la Société Française de Transports et Entrepôts Frigorifiques, fondée en 1920, au capital de 10 millions.


A l’origine, la Compagnie PLM appela à participer à cette création plusieurs groupements intéressés aux transports et entrepôts frigorifiques. Par la suite, les Chemins de fer de l’Est, du Nord, d’Alsace et de Lorraine apportèrent leur adhésion à la nouvelle Société et le capital fut porté progressivement à 40 millions de francs.


Nous allons examiner maintenant d’une façon succincte les résultats qui ont été obtenus dans la branche « wagons » et dans la branche « Entrepôts ».

Wagons

Au cours de l’exposé qui précède, nous nous sommes servi du terme général wagons frigorifiques qui était adopté jusqu’ici pour désigner l’ensemble des wagons spéciaux aménagés de façon à produire ou à maintenir à l’intérieur une température déterminée.

Types de wagons

  • D’après un récent accord intervenu entre tous les Réseaux européens, on distingue aujourd’hui quatre types de wagons de cette catégorie
    • 1° wagon isotherme,
    • 2° wagon calorifique,
    • 3° wagon réfrigérant,
    • 4° wagon frigorifique.

Le wagon isotherme

C’est un wagon dont la caisse est construite de façon à maintenir à l’intérieur une température aussi constante que possible. Il n’est pas pourvu d’appareils permettant la production d’une température déterminée à l’intérieur de la caisse. Les parois, la toiture et éventuellement le plancher du wagon sont doubles ou triples et les espaces intermédiaires comprennent simplement une couche d’air ou bien sont garnis de matières isolantes. Les portes et, le cas échéant, les fenêtres et les baies d’aération sont à fermeture étanche pour empêcher le passage de l’air entre l’extérieur et l’intérieur de la caisse et vice versa.


Le wagon isotherme n’exige aucun soin spécial pendant le transport.


En somme, les wagons isothermes proprement dits ne comportent par eux-mêmes ou par leur aménagement intérieur aucune source de froid ou de chaleur et ne tirent leurs avantages que de l’isolation. Ils sont destinés au transport des marchandises qui possèdent, en elles-mêmes ou dans leurs emballages, un volant de froid important, ou qui doivent être protégées en été contre l’action de la chaleur et en hiver contre l’action du froid. Ils servent à transporter :

  • En toutes saisons :
    • le poisson frais en caisses glacées,
    • les viandes congelées,
    • les oeufs congelés,
    • la glace à rafraîchir, etc.
  • En été :
    • le lait en bidons coiffés de glace,
    • la bière refroidie à basse température, etc.
  • En hiver, les produits qui craignent particulièrement l’action de la gelée:
    • bananes, oranges, pommes de terre, citrons,
    • vins de Champagne,
    • eaux minérales, etc.


  • On doit comprendre, dans la catégorie des wagons isothermes, les wagons-citernes destinés au transport du lait refroidi à + 4° et constitués par une triple enveloppe :
    • Cylindre en acier inoxydable au nickel – chrome,
    • Revêtement de liège expansé,
    • Revêtement en acier.


Une partie des 34 wagons citernes que possède la STEF comportent à chaque extrémité des caisses réfrigérantes ou grillagées pour le transport des divers produits de laiterie : beurres, crème, fromages.

Le wagon calorifique

C’est un wagon dont la caisse est construite comme celle du wagon isotherme. Il est pourvu à l’intérieur d’un appareil de chauffage sans installations mécaniques.


Le wagon calorifique peut nécessiter des soins spéciaux pendant le transport.


Les wagons de cette catégorie sont utilisés plus spécialement en hiver pour le transport des bananes, qui sont très sensibles au moindre froid.

Le wagon réfrigérant

C’est un wagon dont la caisse est construite comme celle du wagon isotherme. Il est pourvu à l’intérieur d’une source de réfrigération constituée par de la glace fondante, des mélanges réfrigérants ou une autre combinaison produisant du froid sans exiger d’installations mécaniques. Le wagon réfrigérant peut nécessiter des soins spéciaux pendant le transport.


En général, les wagons réfrigérants comportent à l’intérieur, à chaque extrémité, des bacs ou paniers métalliques servant au chargement de la glace, et deviennent ainsi, lorsqu’ils sont pourvus de glace, générateurs de froid jusqu’à concurrence de la fusion du produit réfrigérant.


  • Ils peuvent être munis :
    • d’un système de ventilation forcée, qui oblige l’air intérieur ou extérieur à passer sur la glace où il se refroidit, puis sur les marchandises,
    • de planchers mobiles permettant de disposer les paniers ou caisses sur plusieurs plans de chargement, de façon à supprimer l’empilage et, par conséquent, l’échauffement des marchandises,
    • de crochets de suspension au plafond pour le transport des viandes fraîches.


Les wagons réfrigérants sont appropriés au transport des denrées et des produits qui exigent, en tous temps, une ventilation plus ou moins forte, tels que les viandes fraîches suspendues et, pendant l’été notamment, un refroidissement de la température ambiante : beurres, fromages, fleurs coupées, fruits frais, légumes frais, etc.

Le wagon frigorifique

C’est un wagon dont la caisse est construite comme celle du wagon isotherme. Il possède des installations mécaniques permettant la production de températures déterminées à l’intérieur de la caisse.


Le wagon frigorifique exige, en général, des soins spéciaux pendant le transport.


Les wagons de ce type, qui comportent en réalité une petite usine frigorifique, offrent des avantages importants au point de vue de la production du froid et de la régularité de la température intérieure. Ils sont donc susceptibles de transporter en tous temps, dans de bonnes conditions, les denrées de toutes catégories.


Mais ils présentent, dans l’état actuel de la science, des inconvénients assez graves tels que : prix de revient élevé de la construction et de l’exploitation et risque de dérangement des appareils mécaniques. C’est ce qui fait que ces wagons sont encore très rares et n’existent guère, aussi bien en Amérique qu’en Europe, qu’à l’état d’échantillons.

Régime des transports

Tous ces wagons circulent sur les Réseaux français aux conditions du tarif GV 121 et PV 29. Un certain nombre de tarifs spéciaux (GV 3/103, GV 303, PV 400, etc.) contiennent des dispositions particulières pour les transports effectués dans ces wagons.

Parc de la STEF

  • Le parc de wagons de la STEF a augmenté sans cesse depuis la fondation de la Société. Nous donnons ci-après le nombre de véhicules exploités d’année en année depuis 1922 :
    • 1922 : 621 wagons,
    • 1923 : 621 wagons,
    • 1924 : 638 wagons,
    • 1925 : 704 wagons,
    • 1926 : 728 wagons,
    • 1927 : 748 wagons,
    • 1928 : 766 wagons,
    • 1929 : 893 wagons,
    • 1930 : 890 wagons,
    • 1931 : 1 094 wagons.


L’importance de ce parc augmentera encore en 1932.

Trafic

  • Les efforts de la STEF se sont tout d’abord portés vers l’organisation rationnelle des transports de marée fraîche en wagons isothermes au départ de Boulogne sur Mer, Gravelines, Dunkerque, etc., et en direction de Paris et du Réseau PLM, puis en direction des autres Réseaux. Elle a obtenu en quelques années des résultats remarquables qui se traduisent par les chiffres suivants :
    • 1922 8 671 t
    • 1923 15 634 t
    • 1924 20 150 t
    • 1925 27 279 t
    • 1926 30 000 t
    • 1927 35 306 t
    • 1928 45 017 t
    • 1929 51 178 t
    • 1930 51 842 t
    • 1931 68 065 t

Dans ce dernier chiffre, on compte 18 000 t, soit plus de 26 % destination du Réseau PLM.


  • Cette progression rapide démontre nettement que l’emploi des wagons isothermes contribue avec efficacité à l’extension des transports de denrées périssables. La STEF a également organisé des services réguliers pour le transport :
    • des viandes fraîches expédiées du Bourbonnais à destination de Paris, de Marseille et du littoral méditerranéen,
    • des volailles expédiées de la Bresse sur Paris,
    • des fleurs fraîches coupées de la Côte d’Azur à destination de Paris et de l’Angleterre, via Boulogne sur Mer ou Dunkerque,
    • de toutes denrées périssables expédiées en été de Paris sur Lyon, Marseille, Toulon et le Littoral.


  • D’autre part, cette Société met un très grand nombre de wagons spéciaux à la disposition des brasseries, laiteries, fromageries, importateurs de bananes, fabricants de glace alimentaire, expéditeurs de vins de Champagne, etc. Nous indiquons ci-après les tonnages de divers produits transportés en 1931 dans les wagons de la STEF.
    • Lait: 106 700 t
    • Bananes: 20 600 t
    • Poisson frais: 68 000 t
    • Glace : 7 800 t
    • Bière : 30 200 t
    • Denrées diverses : 8 700 t
    • Viandes : 26 400 t
    • Ensemble : 268 400 t


Ces 268 400 t de produits représentent 54 000 wagons chargés à 5 t qui, réunis, auraient pu former 1 800 trains de messageries composés de 30 wagons chacun.

Entrepôts

Les entrepôts frigorifiques, qui sont appelés à jouer, de plus en plus dans l’avenir, un rôle essentiel dans la distribution et la répartition des denrées périssables, permettent de conserver durant un temps plus ou moins long, selon la nature des marchandises, des produits aussi divers que les viandes congelées, viandes fraîches, volailles, gibiers, beurres, fromages, oeufs congelés, oeufs frais en coque, poissons, fruits frais ou secs, bières, plantes, fleurs, extraits pharmaceutiques, fourrures, etc.


On a objecté parfois, à l’encontre des entrepôts frigorifiques, qu’ils contribueraient à la cherté de la vie par leurs entreposages et accepteraient de conserver des marchandises de qualité inférieure. Cette opinion ne peut émaner que de personnes mal informées, car c’est justement tout le contraire qu’on obtient dans ces établissements. En effet c’est parce que les producteurs et négociants peuvent entreposer leurs denrées en chambres froides qu’ils ne font aucune perte, ce qui influence favorablement les cours. On ne peut conserver utilement en chambres froides que des marchandises de qualité. Les entrepôts frigorifiques sont contrôlés journellement, notamment à Paris, par la Préfecture de Police, le Service de la Répression des fraudes et par des vétérinaires officiels. Les producteurs réclament partout la construction de nouveaux entrepôts frigorifiques pour la préréfrigération des fruits, légumes, etc.


La STEF exploite directement les entrepôts frigorifiques de Paris - Bercy, Dijon et Toulon et va construire prochainement un entrepôt du même genre à Strasbourg. Elle a, de plus, des intérêts importants dans les établissements similaires de Lyon Perrache, Genève et Bâle. Tous ces établissements sont raccordés directement au chemin de fer.


Enfin, elle a mis à l’étude la construction de plusieurs établissements de même nature et d’abattoirs frigorifiques en différents points.


Le tableau (figure 6) donne quelques renseignements sur les trois établissements qu’elle exploite directement à ce jour :


Il est à noter que l’entrepôt de Toulon n’a été ouvert à l’exploitation qu’au mois d’octobre 1931 c’est ce qui explique le peu d’importance du tonnage entreposé en 1931.


  • Ces établissements comportent en outre :
    • Paris Bercy, Dijon et Toulon une fabrique de glace (eau congelée),
    • Dijon et Toulon : une fabrique de crèmes glacées,
    • Paris Bercy : une installation pour le traitement des vins par le froid,
    • Toulon : une installation pour le traitement des salaisons.

Conclusion

En résumé, sous l’impulsion de la Compagnie PLM et des autres Réseaux qui se sont joints à elle, la STEF a pu réaliser à ce jour un programme intéressant pour le transport et la conservation des denrées périssables.


Son activité doit tendre maintenant, de plus en plus, à développer le transport des primeurs qui constituent une des richesses des régions desservies par le Réseau PLM. Le problème sera résolu par la construction de stations de préréfrigération et de wagons réfrigérants spécialement aménagés.