Bulletin PLM N° 6 de Novembre 1929, Fonctionnent financier des grands réseaux

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Bulletin PLM N° 6 de Novembre 1929, Comment fonctionnent les grands réseaux au point de vue financier par M. Robert Pajot - Lacaze, Docteur en Droit, Attaché au Service Central de l’Exploitation.

Article

On ignore assez fréquemment dans le public, même parmi les cheminots, comment fonctionne le système financier des grands Réseaux d’intérêt général.


Chacun de nous a, plus ou moins, entendu parler de la Convention de 1921, mais l’idée qu’il s’en fait est bien vague, à de rares exceptions près.


C’est, en effet, la Convention du 28 juin 1921, approuvée par la loi du 29 octobre suivant et appliquée rétroactivement à partir du 1er janvier de la même année, qui a déterminé le nouveau régime financier des chemins de fer actuellement en vigueur.


  • Les Conventions de 1883, qui régissaient l’ancien système et qui avaient été passées, comme celle de 1921, entre l’Etat et les Réseaux, avaient fixé un cycle à quatre phases :
    • Si les recettes étaient insuffisantes, le Réseau avait recours, par le jeu de la garantie d’intérêt, à l’Etat qui, sous forme d’avance remboursable et productive d’intérêt, complétait le quantum nécessaire au service des obligations et à la charge du « dividende garanti ». (Suivant les clauses de 1883, l’expiration de cette garantie devait avoir lieu le 31 décembre 1914, pour les Réseaux du Nord et du PLM, qui n’avaient d’ailleurs, à fin 1913, aucune dette de garantie vis-à-vis de l’Etat. La loi promulguée le 26 décembre 1914 autorisa ces Compagnies, en raison des circonstances, à imputer provisoirement leurs insuffisances à leur compte d’établissement, en émettant des obligations pendant les hostilités. Dans la Convention de 1921, il a été stipulé que l’Etat, en même temps qu’il faisait remise aux autres Compagnies de leur dette de garantie afférente aux exercices de guerre, supporterait, à titre définitif, les charges des obligations émises, par les Compagnies du Nord et du PLM, en conformité de la loi du 26 décembre 1914 précitée).
    • Les recettes avaient-elles assez progressé ? E lies permettaient alors, non seulement de faire face aux dépenses et aux charges, mais de rembourser la dette de garantie.
    • Lorsqu’un bénéfice subsistait après ces diverses opérations, la Compagnie était autorisée à prélever un superdividende, portant le dividende garanti à ce qu’on avait appelé le dividende réservé avant partage.
    • Enfin, si ce dernier dividende se trouvait lui-même dépassé, l’excédent était partagé entre l’Etat et la Compagnie, dans la proportion des deux tiers pour le premier et d’un tiers pour la seconde. (A plusieurs reprises avant la guerre de 1914, notre Compagnie avait donné lieu à la réalisation de cette quatrième phase.)


De multiples et graves raisons obligèrent à modifier ce régime, qui ne pouvait plus persister, surtout en présence du bouleversement économique enfanté par la guerre mondiale.


Le nouveau régime, qui englobe, non seulement les Compagnies concessionnaires, mais les Réseaux d’Etat, se caractérise essentiellement par la création d’un organisme commun, destiné à assurer la solidarité à la fois administrative et financière de tous les Réseaux.


Cette coordination s’est réalisée par l’institution d’un Comité de direction, d’un Conseil supérieur et d’un fonds commun.


C’est dans ce dernier, manifestation la plus typique du système au point de vue financier, que les Réseaux versent leurs excédents en commun, et qu’ils puisent également en commun selon leurs besoins respectifs.


  • Mais ces excédents ne sont pas obtenus arbitrairement. Ils sont, en quelque sorte, déterminés légalement, suivant des règles uniformes imposées par la Convention. Avant tout versement au fonds commun, en effet, chaque Réseau prélève sur ses recettes brutes d’exploitation :
    • ses dépenses d’exploitation,
    • les charges effectives de son capital social et de ses emprunts,
    • les insuffisances de ses participations financières et de ses exploitations annexes,
    • son dividende garanti,
    • ses primes Réseau et personnel.


Si l’opération laisse un reliquat, celui-ci est absorbé par la caisse collective, où viendront justement se servir les Réseaux dont les recettes seront trop faibles pour couvrir les prélèvements énumérés de a) à e).


Cette coopération financière, lorsque les bénéfices des Réseaux excédentaires sont assez élevés, assure automatiquement l’équilibre des recettes et des charges pour l’ensemble des Réseaux et libère l’Etat du déficit de ses propres Chemins de fer, ainsi que des versements au titre de la garantie d’intérêt.


Toutefois, il était opportun de considérer, c’était le cas à l’époque où la Convention fut signée, que tous les Réseaux ou le plus grand nombre pourraient être, à un moment donné, déficitaires et que les plus-values des uns n’arriveraient pas à balancer les insuffisances des autres.


Pour parer à cette éventualité, la Convention a prescrit des augmentations automatiques des tarifs, destinées à faire remonter le niveau des recettes et à combler le vide creusé par l’excédent des dépenses et charges.


La Convention a également admis que les ressources, obtenues par ce relèvement des taxes, pouvaient ne pas procurer complètement le résultat cherché, ou que l’augmentation des tarifs pouvait être arrivée à son point de saturation. L’Etat doit alors faire les avances nécessaires.


Il est à espérer que cette situation et la précédente, qui se sont rencontrées à diverses reprises depuis la mise en vigueur du nouveau régime, par suite des circonstances exceptionnelles nées de la guerre, ne se retrouveront plus.


Envisageons maintenant l’hypothèse contraire, réalisée pour les exercices 1926 et 1928, d’un trop-plein dans le fonds commun lui-même. Quelle affectation reçoit-il ? Il est employé tout d’abord, à rembourser, s’il y a lieu, les avances faites par l’Etat aux Réseaux, ensuite, à constituer la réserve du fonds commun, dont le maximum a été fixé à 1 milliard 300 millions de francs, enfin, à abaisser les tarifs, les recettes réalisées sur les usagers retournant, par cette voie, aux usagers eux-mêmes, ce qui revient à dire que les bénéfices des Réseaux sont strictement maintenus dans la limite formée par le total du dividende garanti et du tiers environ de la prime, la part revenant au personnel étant généralement le double de celle attribuée au Réseau.


On voit donc, en définitive, la différence qui sépare le régime de 1883 de celui de 1921 :


Antérieurement à la dernière Convention, chaque Réseau jouissait de l’autonomie financière et de la libre disposition relative de ses recettes.


Depuis 1921, non seulement les Compagnies sont solidaires les unes des autres et ne jouissent de leurs bénéfices que dans une mesure restreinte, mais, en outre, elles doivent garantir, en période normale, les résultats financiers des Réseaux de l’Etat, celui-ci se trouvant ainsi déchargé, à la fois, des déficits éventuels de ses propres chemins de fer et des avances de garantie qu’il devait faire, le cas échéant, aux Compagnies concessionnaires.