Bulletin PLM n°14 de mars 1931: désherbage chimique à grand rendement des voies de chemin de fer

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Malgré le terrain peu favorable que paraît être le ballast, les voies sont fréquemment envahies par les herbes, et celles-ci sont presque toujours des plantes tenaces à longues racines, lesquelles, sous le ballast, vont chercher leur nourriture dans la plateforme de la voie, plus riche en éléments fertiles.


Les tiges et les racines se renouvellent, celles qui meurent se décomposent, polluent le ballast et le rendent imperméable. L’eau séjourne alors dans les cailloux ou dans le sable, et les traverses, environnées de boue, ne tiennent plus le bourrage. Les traverses « danseuses » apparaissent et la voie devient cahotante.


Aussi les cantonniers doivent-ils arracher périodiquement les herbes, soit spécialement sur certaines lignes où la végétation est abondante, soit au cours des révisions d’entretien qui nécessitent le dégarnissage de la voie, si les herbes sont peu nombreuses.


Le temps passé à ce travail est évidemment variable suivant les cantons; mais le Réseau PLM dessert, avec ses 10 000 km de lignes, maintes contrées riches en germes de plantes herbacées et on pouvait, car cela est le passé, évaluer le nombre de journées de cantonniers nécessaires au désherbage des voies, sur l’ensemble du Réseau, à près de deux cent mille par an. De plus, l’ameublissement du ballast par le travail à la main constitue un véritable binage, qui facilite le développement ultérieur de l’herbe.


Depuis six ou sept ans, le PLM a fait des recherches qui ont abouti à une application de plus en plus étendue du désherbage chimique, auquel il a, le premier, donné un caractère pratique en remplaçant l’épandage d’une solution herbicide diluée (arrosage) par celui d’une solution concentrée projetée en fine buée (pulvérisation). Ce procédé réduit la consommation d’eau dans la proportion de 90 %. On verra plus loin l’importance de cette innovation.


Nous nous occuperons seulement, dans ce numéro du Bulletin, du désherbage à grand rendement des voies principales.


L’appareillage utilisé pour ce travail a été inventé par M. Grattepain, Ingénieur adjoint au Service Central de la Voie. Il s’était rendu compte dès les premiers essais de pulvérisation, exécutés avec des appareils à dos, analogues à ceux employés pour la vigne, que cet outillage, pour intéressant qu’en fût l’usage, était notoirement insuffisant pour les désherbages entre les gares, car il faut pulvériser 500 litres de liquide pour traiter un km de voie, et le transport à pied d’oeuvre des trois à quatre mètres cubes nécessaires entre deux gares se serait traduit par une dépense de main-d’oeuvre importante. L’application même aurait nécessité une centaine d’heures de cantonnier par 6 km de voie simple.


M. Grattepain établit alors les plans d’une machine pouvant pulvériser les quantités nécessaires de solution à la vitesse d’un train de marchandises et suivre automatiquement les variations de vitesse du train, afin que la quantité de désherbant appliquée par mètre de voie reste la même, quelle que fût la vitesse du train remorqueur.


L’appareillage est très important, comme le montre la figure 1, car la saison la plus propice au désherbage n’est pas très longue il faut donc aller vite. Quelques chiffres montreront l’importance des moyens à mettre en oeuvre. En 1928, on a désherbé 5 000 km de voie en cinquante-trois jours, soit à une cadence moyenne journalière de 94 km, qui représentent environ 500 000 mètres carrés désherbés par jour. Le système, qui ne comprenait alors qu’un seul wagon citerne, a été doté depuis d’un deuxième wagon citerne pour augmenter son rayon d’action entre deux chargements. Pendant la campagne dernière, on a traité, dans une journée, jusqu’à 206 km de voie, représentant plus d’un million de mètres carrés.


Pour ce parcours d’une seule journée, il a fallu charger dans les citernes près de 17 500 kg de sel herbicide et les mettre en solution dans 70 000 litres d’eau (pour l’application en arrosage, il eût fallu préparer la solution avec 700 000 litres d’eau ce qui correspond au volume de vingt-huit grands wagons citernes).


Voici comment s’effectue l’opération. A l’arrivée dans une gare de ravitaillement, le système passe sous une grue hydraulique et les citernes sont remplies jusqu’au niveau convenable pour ménager la place du sel herbicide. Celui-ci, livré en barils métalliques, est déversé dans un tiroir à hauteur d’appui, placé entre les roues d’un des wagons citernes. A partir de cette opération, tout se fait mécaniquement : préparation de la solution et chargement dans la citerne, brassage et filtrage.


On attelle alors le système à un train de marchandises, direct autant que possible, pour ne pas perdre de temps dans les gares et, dès que l’on atteint une partie à désherber, on ouvre les vannes. L’appareil répand alors sur le sol la solution herbicide qui, au bout de quelques heures ou de quelques jours suivant les plantes, dessèche complètement la végétation.


A cet effet, l’appareil d’épandage extrait le liquide des wagons réservoirs au moyen d’une pompe qui le refoule dans une série de rampes munies de becs pulvérisateurs destinés à transformer ce liquide en une buée afin de tapisser les plantes de très fines gouttelettes, restant bien adhérentes au feuillage. La figure 2 montre la buée liquide projetée sur la voie par les pulvérisateurs.


La pompe est actionnée par l’essieu du wagon; elle donne donc un débit d’autant plus important que la vitesse du train est plus grande. Simultanément, à l’intérieur des rampes de pulvérisation, glisse un piston qui découvre automatiquement des becs pulvérisateurs en nombre voulu pour distribuer le volume de liquide envoyé par la pompe.


Si le train marche à 16 km à l’heure, la pompe fournit 120 litres à la minute et il y a huit becs pulvérisateurs en fonctionnement sur chaque rampe. Si la vitesse s’accélère et passe à 32 km/h, puis à 48 km/h, la pompe débitera 240 litres, puis 360 litres à la minute, seize becs pulvérisateurs seront entrés automatiquement et successivement en action quand la vitesse aura atteint 32 km/h, et vingt-quatre quand elle sera montée à 48 km/h. Lorsque la vitesse décroît, les becs pulvérisateurs se referment automatiquement un à un jusqu’à concordance avec la nouvelle vitesse réalisée.


De cette façon, sans intervention du conducteur dont le rôle se borne à surveiller le fonctionnement des organes, et quelle que soit la vitesse du train auquel est attelée la machine, il y a toujours une même quantité de solution herbicide déposée par mètre courant de voie, c’est-à-dire ni moins ni plus qu’il n’en faut pour détruire les herbes.


L’appareil comporte, en outre, un variateur de débit, qui permet d’augmenter la dose appliquée quand la végétation devient particulièrement importante, et des dispositifs destinés à supprimer la projection du liquide désherbant sur certaines zones qui ne doivent pas être traitées. Le volume de liquide qui leur était destiné est alors renvoyé dans le wagon citerne par un système équilibreur qui évite toute variation intempestive du débit de celles des rampes pulvérisatrices qui restent en fonction.


Cet ensemble permet une exécution très économique du désherbage chimique, la dépense correspondante étant à peine le quart de celle du désherbage à la main. C’est également un procédé fort efficace, dont les effets se font, d’année en année, sentir plus définitifs.


La désherbeuse à grand rendement décrite ci-dessus est utilisée maintenant sur plusieurs autres Réseaux français et étrangers.