RGCF d’avril 1935 : suppression des passages à niveau de Roanne

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Titre

Travaux de suppression des passages à niveau de Roanne par M. Bouvet, Ingénieur en chef honoraire et M. Virot, Ingénieur adjoint du 11ème Arrondissement de la Voie au PLM

Documents

Généralités

L’importance de la circulation routière avait fait une nécessité urgente de la suppression de trois passages à niveau. Deux d’entre eux furent remplacés par un passage supérieur en forme d’X, donnant, par de vastes rampes, accès à une place et à neuf rues environnantes.


La note, essentiellement consacrée à la description des divers ouvrages, donne des détails particuliers sur ce passage supérieur, qui est le plus original et le plus important de tous.


La Compagnie PLM a terminé, en septembre 1933, les travaux de suppression des trois passages à niveau N° 197, 198 et 199 de la ligne du Bourbonnais (Paris à Lyon par Saint-Etienne).


Ces passages à niveau, notamment les passages à niveau 197 et 199, apportaient une gêne considérable aux relations de la ville de Roanne avec les faubourgs Mulsant et de Clermont, dont la population, augmentée de celle de la Commune voisine de Riorges, représente à peu près le tiers de la population totale de l’agglomération roannaise.


Les passages à niveau 197 et 199 étaient respectivement empruntés par deux lignes de tramways fort importantes (Figure 1). Le passage à niveau 197, particulièrement fréquenté aux heures d’entrée et de sortie des usines, était traversé, chaque jour, par plus de vingt mille piétons, pour la plupart à bicyclette.


Par ailleurs, ces passages à niveau étaient dotés d’avertisseurs, de moyens de correspondance et de signaux spéciaux dont l’usage était réglé par des consignes locales. Leur gardiennage, spécialement renforcé, nécessitait un effectif permanent de neuf gardes et de cinq journaliers.


Il y avait cependant, malgré toutes ces mesures, une situation extrêmement délicate que l’accroissement continu de la circulation routière ne pouvait qu’aggraver.

Historique

Cette situation avait de longue date préoccupe les Services de la Compagnie qui, avant 1914, présentèrent successivement divers projets de suppression de ces passages à niveau, auxquels aucune suite ne fut toutefois donnée.


En 1918 et 1919, deux accidents graves remirent cette question à l’ordre du jour : un tramway fut tamponné au passage 199 par une machine isolée, il y eut trois blessés et un accident analogue se produisit au passage 197 et entraîna deux morts.


La Compagnie demanda alors à l’Administration Supérieure d’imposer des mesures spéciales destinées à renforcer la sécurité des usagers des tramways, au franchissement des passages à niveau.


Un projet fut ensuite présenté en 1924, qui prévoyait la suppression définitive des trois passages à niveau 197, 198 et 199. Après de nombreuses études sur les dispositions techniques du projet et sur les moyens financiers propres à couvrir les dépenses, études poursuivies en accord avec la Ville de Roanne, un projet définitif fut soumis à l’Administration Supérieure le 26 Mars 1931.


Les passages à niveau 197 et 198 seraient remplacés par un passage supérieur en forme d’X, donnant, par de vastes rampes, accès à neuf rues avoisinantes et aux promenades Populle.


Par suite des modifications apportées au profil en long des voies principales, le passage à niveau 199 serait remplacé par un passage inférieur.


Le pont sur la rivière « le Renaison » serait exhaussé et les passages voûtés des rues Hoche et Lachambaudie, qui assuraient des relations incommodes entre la Ville de Roanne et ses faubourgs, seraient remplacés par des passages inférieurs plus larges et plus spacieux.


Les travaux seraient exécutés aux frais de la Commune de Roanne, la participation de la Compagnie s’élevant, par suite de la suppression du gardiennage, à un montant de 1 700 000 francs.


Ce projet reçut l’approbation de l’Administration Supérieure le 18 Mai 1931. L’ensemble des travaux fut mis en adjudication le 26 Janvier 1932. Les chantiers furent ouverts dès Avril 1932 et l’inauguration des nouveaux ponts eut lieu le 24 Septembre 1933.

Description des principaux ouvrages

  • L’exécution de ce projet entraîna la construction de quatre ouvrages dont la description est indiquée ci-après, savoir :
    • Le pont supérieur des promenades Populle,
    • Le pont sur la rue Brison (Route Nationale N° 81),
    • Le pont sur la rivière « Le Renaison » qui a été allongé et exhaussé,
    • Les ponts sur la rue Lachambaudie et la rue Hoche et une très importante modification du profil en long de la ligne (Figure 2).


A partir de la gare de Roanne, la ligne s’abaisse d’abord en pente de 14 mm pour passer, au droit du pont des promenades Populle, à deux mètres en contrebas de la situation ancienne, puis, après un palier de 155 mètres se relève en rampe de 5 mm, de manière à franchir la rue Brison, par dessus, au droit de l’ancien passage 199 et se raccorde par une pente de 10 mm et un palier à l’ancien profil un peu avant le viaduc de la Loire.

Pont des Promenades Populle

Cet ouvrage, le plus important de l’ensemble des travaux, présente la forme d’un X pourvu de vastes dégagements et de rampes d’accès qui le relient aux promenades Populle et à neuf rues avoisinantes (Voir figure 3 donnant une vue aérienne de l’ensemble de l’ouvrage et figures 4 et 5 donnant les plans des situations ancienne et nouvelle).


L’ouvrage est biais à 61°38’ sur l’axe du Chemin de fer. Son ouverture droite entre culées est de 20 m avec une palée intermédiaire parallèle aux voies. Sa largeur minimum entre garde-corps est de 30 mètres.


Il assure le passage de deux chaussées de 9,50 m de largeur minima chacune, séparées par un refuge central. Il porte, en encorbellement, deux trottoirs avec garde-corps.


Sa forme tout à fait spéciale, ouvrage~biais, de largeur variable avec poutres de rive curvilignes qui rendait son exécution difficile, a conduit à l’emploi du béton armé.


Le tablier est constitué par une dalle en béton armé de 0,60 m d’épaisseur, protégée à sa partie inférieure par une surépaisseur de béton armé de 0,06 m formant pare-fumée, recouverte elle-même, en dessous, d’une peinture protectrice anti-acide.


Ce tablier prend appui sur deux culées en maçonnerie et sur une palée en béton armé.


La chaussée est constituée par des pavés d’asphalte et l’étanchéité du tablier est assurée par une chape souple bitumineuse. Les trottoirs sont asphaltés et le garde-corps est en pierre reconstituée bouchardée.

Calculs

Les calculs ont été établis conformément aux règlements ministériels en vigueur. Nous signalerons, à ce sujet que, en raison de la forme particulière du tablier, la dalle sous chaussée a été décomposée en poutres fictives de 1,45 m de largeur, normales aux culées et à la palée, prenant appui, suivant leur position, soit sur celles-ci, soit sur les culées et les poutres de rive curvilignes formant trottoirs. Les poutres ainsi envisagées ont été calculées sous les divers cas de surcharges donnant les efforts maxima.

Exécution

Etant données la forme de l’ouvrage et l’importance des armatures dont la mise en place demandait une grande précision en raison de leur enchevêtrement sous des angles parfois très aigus, l’entreprise a apporté tous ses soins à la confection des coffrages, au ferraillage et au coulage du béton.

Les coffrages

A l’exception des moules en tôle qui ont modelé les cannelures des becs amont et aval de la palée, les coffrages ont été réalisés au moyen de planches de sapin blanchies, de dimensions standardisées, pour réduire le nombre des types à mettre en oeuvre.


La charpente de support de l’ouvrage, qui devait dégager les deux voies, était constituée par une série de portiques espacés de 1,20 m. Une plaque de protection en fibrociment a été disposée au-dessus de chacune des voies principales pour protéger les coffrages contre la fumée des machines (Figure 6). L’ensemble de ces coffrages a exigé environ 300 m3 de bois.

Les armatures

La figure 7 fait ressortir l’importance des armatures du tablier, ainsi que leur enchevêtrement.


Il a été employé, au total, 103 tonnes d’acier de 6 à 40 mm de diamètre. Toutes les armatures ont été confectionnées sur le chantier.

Le Béton, la « Pervibration »

Le béton a été exécuté en sable et gravillon criblé de la Loire.


Il a été dosé à 400 kg pour la dalle parafumée et à 300 kg pour le reste de l’ouvrage. Le ciment employé était de la classe 20/25.


En raison de l’enchevêtrement et du pourcentage élevé des armatures en certains points du tablier, le simple pilonnage du béton apparaissait comme une opération très difficile et peu susceptible de donner un béton de très bonne qualité, tant au point de vue de la résistance à l’écrasement que de la compacité. L’entreprise a donc cherché à cet effet un procédé de pilonnage plus sûr et plus rapide.


La vibration du béton, utilisée dans d’autre cas, ne pouvait s’appliquer ici. On ne pouvait, en effet, songer à faire vibrer le coffrage d’une dalle d’aussi grandes dimensions, ni à faire vibrer directement les armatures, ce qui risquait d’entraîner, par suite de leur grande longueur, des ruptures d’adhérence sur les parties où elles pouvaient être engagées dans du béton ayant déjà fait prise.


On a préféré faire pénétrer la vibration au sein du béton lui-même en l’animant, de place en place, au moyen de pervibrateurs en forme de fourches constituées par des lames de tôle flexibles pouvant s’engager entre les armatures (Figure 8).


Le cube total de béton de l’ouvrage est de 650 mètres cubes.

Bouchardage

Les parties vues de l’ouvrage ont été bouchardées avec relevé de ciselures d’arête.


Grâce au soin apporté dans les coffrages et aux heureux effets de la pervibration, le bouchardage a donné des résultats satisfaisants et agréables à l’oeil.

Épreuves

Les épreuves eurent lieu le 30 Septembre et le 2 Octobre 1933. Elles furent faites sur les parties où on était susceptible de trouver les plus grands efforts et les plus grandes portées, c’est-à-dire dans la travée côté voie 1 et côté Lyon du tablier.


  • Les parties intéressées furent :
    • le trottoir en encorbellement côté Lyon,
    • le tablier proprement dit,
    • la poutre de rive, côté Lyon, du tablier.


Les épreuves par poids mort, 400 kg par mètre carré, furent effectuées sur le trottoir et la chaussée de la travée côté voie 1 et côté Lyon du tablier.


Les épreuves par charges roulantes ont été effectuées à l’aide de trois files de deux camions réalisant les files de véhicules (16 t) conformes au règlement ministériel en vigueur.


Les flexions déterminées par les surcharges d’épreuves ont été mesurées au moyen de 13 fleximètres à coulisse type « Bosramier » disposés sous l’ouvrage.


Les résultats de ces épreuves ont été très satisfaisants.

Culées et rampes d’accès

Etant donnée l’importance de cet ouvrage, on a cherché à donner à l’ensemble un caractère monumental (Figure 3).


Les murs de soutènement des rampes d’accès sont du type à arceaux et ont été traités en moellons d’appareil. Ils sont séparés des culées par des pilastres avec chaînes d’angle. Les culées elles-mêmes présentent des voûtes d’élargissement et sont traitées en moellons grossièrement assisés (Figure 9).


Sur toutes les parties vues de l’ouvrage, on a fait jouer les couleurs des matériaux pour contribuer à l’effet décoratif. Les chaînes d’angle et les voussoirs des arceaux sont en pierre blanche de Villette, les piliers sont en porphyre rose, les assises des soubassements sont en grès ou en pierre de Villebois. Au droit des arceaux, les tympans extérieurs sont en moellons mosaïqués de porphyre rose et les remplissages en mosaïque de porphyre bleu.


Enfin, les rampes .d’accès sont couronnées d’un garde-corps identique à celui de l’ouvrage, en pierre reconstituée bouchardée, avec dés de pierre reconstituée rose.

Pont sur la rue Brison (Route Nationale N° 81)

Le passage à niveau 199 a été remplacé par un passage inférieur. Les voies principales, surélevées de 4,80 m, franchissent la rue Brison sur un pont à poutrelles enrobées de 14 m de portée, du type habituellement employé sur le Réseau.


Le choix des matériaux employés donne à cet ouvrage un aspect particulièrement satisfaisant (Figure 10). Les bandeaux de rive du tablier sont agrémentés de panneaux de pierre reconstituée rose, les parements des culées sont en porphyre rose et les chaînes d’angle en pierre blanche de Villette.

Pont sur « Le Renaison »

La voie ferrée, dans la situation ancienne, franchissait la rivière « Le Renaison » sur un pont voûté biais à arc surbaissé de 16 m de portée droite.


Le projet prévoyait d’une part l’allongement de cet ouvrage à gauche de la ligue pour l’installation d’une voie de tiroir et d’autre part, un relevage de 3,50 m du niveau des voies principales au droit du pont.


L’ouvrage relatif à la voie de tiroir qui est immédiatement aux abords des voies principales nouvelles et sensiblement à leur niveau, fut construit en premier lieu. C’est une arche voûtée en béton de ciment de même portée que l’ouvrage ancien présentant à la clé une cote d’intrados plus élevée de 2,50 m.


Du côté opposé à ce nouvel ouvrage, un mur formant tympan fut élevé dans le prolongement du tympan actuel et les culées de l’ouvrage ancien furent épaulées par des arcs-boutants en béton de ciment à 400 kg construits en sous-oeuvre.


Ainsi, malgré l’augmentation considérable de charge permanente et de poussée qui devait en résulter, les voies assises sur un remblai de fines scories pilonnées, furent-elles relevées de 3,50 m sans incident.

Ponts sur les rues Lachambaudie et Hoche

Les rues Lachambaudie et Hoche étaient prolongées, sous le chemin de fer par d’étroits et incommodes passages voûtés.


Dans le but d’améliorer les relations avec ses faubourgs la ville de Roanne avait demandé que le remplacement de ces passages, par des ponts plus larges, fût prévu au projet.


Ces ponts ont tous deux été réalisés au moyen de tabliers à poutrelles enrobées du type habituellement employé sur le Réseau.