241 A, article du Bulletin PLM n°2 de mars 1929

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Titre

Les locomotives PLM du Type Mountain par M. R. Vallantin, Ingénieur en Chef du Matériel et de la Traction

Planche et figures de l’article

Article

Aujourd’hui que la question peut être considérée comme suffisamment au point, le Bulletin PLM se doit d’entretenir ses lecteurs d’un sujet qui est allé, en son temps, jusqu a susciter quelques articles dans la grande presse. Il s’agit des locomotives dites « Mountain » que notre Réseau, concurremment avec celui de l’Est, a le premier mises en service en France.


Le mot « Mountain », montagne en anglais, indique assez bien tout au moins la destination première de ces machines, créées pour la traction des trains rapides et lourds sur les profils difficiles et caractérisées principalement par leur forte adhérence due à l’accouplement de quatre de leurs essieux (figure 1).


Rappelons brièvement la genèse de ces nouveaux engins sur le PLM. En 1921, l’effectif des machines pour trains rapides était devenu un peu insuffisant. Les Pacific (231), affectées à la remorque de ces trains, étaient utilisées à la limite de leur puissance. On commençait à douter qu’elles pussent continuer pendant longtemps encore à respecter les horaires sur les lignes à profil difficile, tant le tonnage des trains allait croissant.


  • NB :On sait que, depuis 1924, le PLM a adopté, pour le numérotage de ses catégories de locomotives, de nouveaux symboles destinés à les caractériser, en particulier, au moyen d’un nombre:
    • à un seul chiffre, quand la locomotive est à adhérence totale, ce chiffre donnant le nombre des essieux moteurs,
    • à deux chiffres, quand elle a un ou des essieux porteurs à l’arrière, mais pas d’essieux porteurs à l’avant. Dans ce cas, le premier des deux chiffres donne le nombre des essieux moteurs, le second, celui des essieux porteurs à l’arrière;
    • à trois chiffres, dès qu’il y a un ou des essieux porteurs à l’avant. Dans ce cas, le premier chiffre donne le nombre des essieux porteurs à l’avant, le second celui des essieux moteurs, le troisième celui des essieux porteurs à l’arrière. Le troisième chiffre est 0 quand il n’y a pas d’essieux porteurs à l’arrière.


Il était donc nécessaire d’étudier, pour la traction des grands trains sur les durs profils, de nouvelles machines.


Or, des Mikado (141) assuraient la remorque de quelques express lourds entre Laroche, Dijon et Vallorbe et leur service avait permis de constater que, contrairement à ce que certains avaient admis jusqu’alors, une locomotive à quatre essieux couplés pouvait atteindre et même dépasser la vitesse de 90 km à l’heure sans fatigue anormale ni de ses organes ni de la voie. C’est ainsi que le PLM mit sa Mountain (241) en chantier.


Destinée à donner à très peu près la vitesse d’une Pacific et à posséder, du fait de son essieu couplé supplémentaire, la fraction d’adhérence qui faisait défaut à cette dernière, construite enfin avec l’intention d’obtenir un plus grand effort de traction, la Mountain fut dotée de cylindres de grandes dimensions. La nécessité correspondante d’augmenter la production de vapeur fit porter la surface de grille du foyer de 4, 25 m2 à 5 m2et conduisit à ménager, entre la voûte en briques et la plaque tubulaire, une chambre de 1,20 m de profondeur, permettant aux gaz de mieux terminer leur combustion avant de pénétrer dans le faisceau tubulaire.


Ces machines compound et à surchauffe furent munies des derniers perfectionnements réchauffeur d’eau d’alimentation, éclairage électrique, avertisseur - enregistreur des signaux à l’arrêt, etc...


On sait que le compoundage est caractérisé par une double détente de la même masse de vapeur d’abord dans les cylindres à haute pression (petits cylindres), ensuite dans les cylindres à basse pression (gros cylindres) et qu’il en résulte une meilleure utilisation de la vapeur.


La surchauffe consiste dans la circulation de la vapeur à l’intérieur de tubes étroits placés eux-mêmes dans quelques-uns des tubes à fumée. Cette circulation confère à la vapeur une température assez élevée pour éviter, lors du travail dans les cylindres, des condensations nuisibles au bon rendement de la machine.


Telles qu’on peut les voir actuellement, avec leur museau allongé par une calotte coupe vent, le « bout de cigare » comme on dit à la Traction, elles ont assez fière allure, les Mountain PLM.


Bien que leur poids soit respectable (117 t en ordre de marche), il n’y paraît guère, grâce à leur forme allongée, et il y paraît encore moins lorsqu’elles sont suivies de leur tender à 30 m3 d’eau et à 7 t de charbon, et qu’elles s’étendent ainsi sur 25,910 m, de tampon avant de la machine à tampon arrière du tender.


Les premières machines livrées, affectées aux dépôts de Laroche et Dijon Perrigny, assurent la traction de certains rapides lourds entre Laroche et Dijon et celle de tous les grands trains entre Dijon et Vallorbe.


La marche des rapides a été sensiblement améliorée, entre Laroche et Dijon, en raison de la facilité avec laquelle il est devenu possible de reprendre la vitesse de régime de marche en cas d’arrêt accidentel.


C’est ainsi qu’on peut atteindre au bout de 3 km, après un arrêt au milieu d’une des rampes de 8 mm par mètre rencontrées aux abords du tunnel de Blaisy, la vitesse de 60 km à l’heure avec un train d’un tonnage de l’ordre de 570 t.

Le tableau T, établi pour le train 513 (Paris - Vallorbe) fait ressortir l’augmentation de la charge offerte sur les fortes rampes du parcours Mouchard - Vallorbe (figure 2), du fait de l’utilisation de Mountain au lieu de Pacific ou de Mikado.

Les vitesses sont celles indiquées au tableau de la marche des trains du 15 mai 1928.

On sait que les difficultés de traction d’un train, sur une partie de ligne déterminée, dépendent en particulier de sa vitesse et des caractéristiques successives de la ligne profil, courbes, etc...Pour tenir compte de ces divers éléments, on assimile chaque section de ligne à une section de rampe uniforme en alignement droit. La rampe ainsi définie est dite rampe fictive de la section. La rampe fictive varie avec la vitesse (Circulaire n° 9 (1928) de l’Exploitation et Instruction n° 461 (nouvelle série) du Matériel et de la Traction).


Devant d’aussi intéressants résultats, on a envisagé l’emploi des Mountain sur le littoral, en raison du profil difficile Marseille - Nice.


Des essais ont été effectués au printemps dernier. Ils ont permis de constater que les temps de parcours pourraient être réduits de vingt à quarante-cinq minutes dans le sens Marseille - Nice et de quinze minutes à une heure dans le sens inverse.


Par l’examen du diagramme (figure 3) de la marche des trains d’essais E-3 et E-4 du 1er février 1928 entre Marseille et Carnoules, on se rendra d’ailleurs facilement compte de la facilité avec laquelle une machine 241 a remorqué un train de 501 t sur des rampes de 8 mm. On remarquera particulièrement qu’au train E-4, la vitesse de 105 km avant un ralentissement à 30 km/h au PK 38 est remontée rapidement et a même atteint 80 km/h en pleine rampe de 8 mm. Quatre-vingt-quinze Mountain sont actuellement en service dans les dépôts de Laroche, Dijon Perrigny, Marseille Saint Charles et Nice Saint Roch.


Leur utilisation a permis d’accélérer la marche des grands trains dans les parties difficiles de notre grande artère, sur lesquelles elles se montrent très nettement supérieures aux Pacific.


Mais pour obtenir cette supériorité dans les rampes, il a fallu consentir à une diminution du diamètre des roues motrices, et il s’en suit qu’en palier ces locomotives, dont les roues n’ont que 1,80 m, au lieu des 2 m des roues des Pacific, ne peuvent atteindre la vitesse de 120 km/h que soutiennent aisément ces dernières. Aussi la Compagnie a-t-elle mis à l’étude un nouveau type de Mountain à roues motrices de 2 m pour la remorque des trains rapides et lourds des sections à profil facile de la grande ligne.