Bulletin PLM n°8 de mars 1930: Les nouvelles locomotives 242 AT

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Les nouvelles locomotives de banlieue PLM 242 AT par M Portal, Ingénieur Principal de la Traction.

Planche et figures de l’article

Article

Il suffit d’avoir assisté en simple spectateur à l’arrivée ou au départ d’un train de banlieue en gare de Paris et d’avoir contemplé la diligence fébrile des voyageurs pour se douter du prix que peut avoir pour un « banlieusard » une seule minute. On peut, en effet, facilement constater qu’au départ, une importante fraction des voyageurs arrive pendant la dernière minute qui précède le coup de sifflet, et qu’à l’arrivée, le train est en grande partie vidé avant son arrêt complet, malgré les appels à la prudence affichés dans toutes les voitures.


Il en résulte qu’une des améliorations du service de banlieue les plus appréciées des usagers est sans conteste la diminution de la durée du voyage, car chaque gain sur un trajet est, pour la plupart d’entre eux, multiplié par 4 à la fin de la journée.


Or, quel est le moyen de diminuer de façon appréciable la durée du trajet ? C’est d’augmenter la vitesse des trains, aurait dit M. de La Palice, qui n’est pourtant pas passé dans l’immortalité pour ses connaissances ferroviaires. Sans doute aurait-il eu comme toujours raison, mais il faut vite remarquer que les problèmes sont différents lorsqu’il s’agit d’augmenter la vitesse d’un train de banlieue et d’augmenter celle d’un rapide. En effet, la vitesse d’un train au cours d’un trajet dépend et de la vitesse maximum qu’il peut atteindre au cours de ce trajet et de la rapidité avec laquelle il atteint cette vitesse maximum. Or, pour un train de banlieue, généralement omnibus, c’est cette dernière qualité qui est de beaucoup la plus importante.


Examinons par exemple le parcours de Paris à Brunoy (21 km) des trains de la banlieue parisienne. Ce trajet est coupé pour les omnibus par sept arrêts. La distance maximum parcourue sans arrêt est de 4,3 km, mais le plus souvent les stations sont éloignées de 2 km. Il est donc inutile d’avoir pour franchir ces distances des locomotives pouvant courir à 120 km à l’heure, puisqu’elles ne pourraient jamais se mettre pleinement en vitesse. Le but que l’on a donc poursuivi a été de gagner du temps sur le démarrage et on peut se montrer satisfait du résultat obtenu sur ce point grâce aux nouvelles locomotives 242 AT mises en service au cours de l’année 1928.


Les trains de la banlieue Parisienne étaient remorqués jusqu’à cette époque par des locomotives Tenders du genre 232, compound à quatre cylindres, possédant trois essieux accouplés encadrés par deux bogies. Les nouvelles locomotives sont, bien que cela paraisse paradoxal, les grandes soeurs de leurs aînées elles ont, en effet, avec les précédentes un petit air de famille elles sont également compound à quatre cylindres, les roues motrices ont le même diamètre, 1,650 m. Elles possèdent exactement la même chaudière, car la production de vapeur fait rarement défaut sur un train de banlieue. Mais, c’est ici que se marque la différence, cette chaudière alimente, sur la nouvelle locomotive, des cylindres plus gros, comme le montre ci-dessous le tableau comparatif des diamètres.


  • 232 BT
    • Diamètre des cylindres :
      • Haute pression : 0,370 m
      • Basse pression : 0,580 m
    • Course des pistons : 0,650 m
  • 242 AT
    • Diamètre des cylindres :
      • Haute pression : 0,420 m
      • Basse pression : 0,630 m
    • Course des pistons : 0,650 m


Il résulte de l’emploi de ces cylindres un effort de traction plus grand, surtout au démarrage.


Pour utiliser au mieux cet effort au démarrage, on a augmenté le poids de la locomotive et, en particulier, le poids porté par les essieux accouplés, c’est-à-dire le poids adhérent, et pour cela on a ajouté un quatrième essieu accouplé. C’est ainsi que la locomotive 242 AT qui comprend quatre essieux accouplés placés entre deux bogies, est dérivée de la locomotive 232.


Le poids total est passé de 106 t à 117 t, le poids sur les essieux accouplés est passé de 48 t à 64 t. La longueur totale de 15,850 m à 17,875 m. La capacité des caisses à eau reste de 12 000 litres, mais l’approvisionnement de combustible a été porté de 3 000 à 5 000 kg.


Malgré sa masse imposante, il faut reconnaître qu’on a pu lui conserver une ligne élégante dont une des caractéristiques est la réunion en une seule bosse de la sablière et du dôme de prise de vapeur, qui forment généralement deux bosses distinctes. On remarque également, se profilant à l’avant du sifflet, la turbo - génératrice qui fournit le courant nécessaire à l’éclairage de la machine.


120 locomotives 242 AT sont maintenant en service aussi bien dans la banlieue parisienne que dans la banlieue de Nice. Elles ont été fort bien accueillies, car les résultats obtenus ont été ceux qu’on attendait.


Il a été possible de gagner une minute sur chaque période de démarrage, ce qui se traduit par un gain de huit minutes pour les omnibus. Le trajet de Paris à Brunoy a été réduit de 46 à 38 minutes, gain dont toute la valeur apparaît quand on remarque que, sur ces 38 minutes, 7 sont prises par les arrêts intermédiaires.


Il faut reconnaître que les démarrages rapides ne sont pas sans inconvénients pour les « banlieusards » retardataires. Il est bien plus difficile qu’autrefois de rattraper le train en marche, mais qu’ils se méfient, car ce qui est maintenant difficile, sera bientôt impossible quand les 242 BT à soupapes seront en service.


On en parlera bientôt.