Bulletin PLM n°6 de novembre 1929: La production et le transport des fruits sur le PLM

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La production et le transport des fruits sur le PLM par M. Malatier, Inspecteur Divisionnaire au Service Central de l’Exploitation.

Article

L’année 1929 a été, jusqu’à présent, tout à fait exceptionnelle, tant par son hiver rigoureux que par son été fort sec, tous deux très prolongés.

Si ces conditions météorologiques spéciales ont favorisé certaines productions, celle du blé, par exemple, il n’en a pas été de même pour les cultures fruitières, qui ont quelque peu souffert dans la presque totalité du pays.

Les vergers, les espaliers et les treilles de notre Réseau n’ont pas échappé aux effets nuisibles de ces deux saisons anormalement accentuées.

Certes, l’ardeur estivale y a fait moins de dégâts qu’ailleurs, en raison de la précocité de nos plantations, due au climat privilégié de plusieurs de nos zones avant que le sol devînt incapable de fournir de la fraîcheur, beaucoup de nos fruits étaient cueillis ou, du moins, avaient atteint toute leur grosseur, échappant ainsi a une dessiccation prématurée.

Mais, utile alors, cette même hâtivité s’était auparavant révélée dangereuse, lors du départ de la végétation, en rendant nos arbres sensibles au froid local et aux courants d’air glacés venus des montagnes dans les riches vallées et les plaines fertiles. Au total, les cultures fruitières des régions desservies par notre Réseau se sont trouvées, tout au plus, dans des conditions moyennes de productivité.

Aussi semble-t-il étrange de constater que les arrivages de fruits aux halles de Paris, en provenance du PLM, se soient élevés cette année à 58 000 t contre 42 000 seulement en 1928, pendant la même période du 1er avril au 30 septembre.

Rien de paradoxal dans ce fait. Il est notoire que le trafic des fruits sur nos voies a presque triplé depuis l’avant-guerre, en dépit des troubles apportés par les hostilités.

En effet, il est passé de 75 000 t environ en 1913, à plus de 200 000 t actuellement... Mais il faut faire sa part exacte à l’influence des années 1914-1919. Elle n’est pas, en cette matière du moins, aussi considérable qu’on pourrait le supposer : dès 1920, plus de 120 000 t de fruits se transportaient sur notre Réseau, de sorte que l’augmentation moyenne a été de 10 000 t par an.

Comparés à cette donnée et, bien que partiels, les chiffres que nous venons de fournir pour 1928 et 1929 montrent, à l’évidence, que l’accroissement du tonnage - fruits est très supérieur à ce qu’il a été antérieurement. Qu’on voie bien, cependant, que le fait n’est pas spécial à cette année. Il est seulement, pour un nouveau millésime, l’aspect d’une évolution commencée il y a cinq ou six ans et de plus en plus marquée depuis lors.

Si l’on regarde de plus près les statistiques, la nature de ce phénomène économique saute aux yeux.

Que les transports de fruits sur le PLM s’accroissent constamment et selon un rythme accéléré au point qu’une année aux conditions médiocres ou mauvaises n’arrive pas à en faire fléchir la courbe ascendante, c est, à coup sûr, qu’un puissant facteur agit pour susciter la production arboricole et favoriser le commerce qui en dérive. Le facteur n’est autre que notre Compagnie elle-même.

Quels sont les éléments d’une circulation fruitière intense ?

Il faut, d’abord, disposer de produits à vendre, il faut ensuite trouver des besoins à satisfaire. Il faut, enfin, créer un moyen de transport convenable pour unir ces deux pôles, l’expéditeur et le client.

Notre Compagnie a attaqué la question simultanément sous ces trois angles production, consommation et liaison entre elles.

  • Les coefficients de la production sont :
    • La surface complantée et le rendement à l’hectare qui détermine la quantité récoltée,
    • La qualité des produits, qui agit sur la proportion de récolte qu’on pourra vendre un bon prix sur les marchés intérieurs, proches ou lointains et surtout à l’exportation.

La qualité est chose essentielle.

Qu’importe, en effet, de produire beaucoup si la valeur infime des fruits obtenus ne paie pas le ramassage et, à plus forte raison, une récolte et une expédition soignées ?

Par qualité, il faut donc entendre en premier lieu, la qualité intrinsèque si l’on peut dire, qui permet de cueillir et d’envoyer des fruits qui, autrement, n’en vaudraient pas la peine.

Toutefois, et ceci est très important encore, surtout pour la fourniture des places étrangères, il faut aussi s’attacher à la qualité commerciale, de nature plus artificielle, sans doute, mais d’autant plus délicate à connaître, à savoir l’adaptation du produit au client auquel on l’adresse et dont il sied de satisfaire les goûts.

Notre Service agricole a fait effort sur ces divers points.

  • Par ses tracts, ses conférences, ses films et plus encore par d’innombrables démonstrations pratiques, il a beaucoup fait pour :
    • étendre les plantations, en particulier pour constituer des pépinières modèles, composées des meilleures sortes commerciales,
    • enseigner la greffe, la taille, la fumure, ainsi que les soins contre insectes et maladies, ceux-ci faisant, d’autre part, l’objet principal de deux Congrès récents sur la lutte contre les ennemis des cultures (Voir Bulletin n°5 de septembre 1929, page 14),
    • améliorer les modes de cueillette et surtout les méthodes d’expédition, triage, calibrage, emballage proprement dit,
    • renseigner le cultivateur sur les centres de consommation, tant en France qu’à l’étranger, et sur la manière de présenter les fruits selon le destinataire (variété, état de maturité, emballage, etc...).

Dans le même temps, la consommation sollicitait une autre part de l’activité du Service agricole. Il en étudiait l’importance, la répartition et la nature, si variable selon les endroits.

Surtout, il s’appliquait avec le plus grand succès à la développer et parfois même à la modeler en faveur de nos expéditeurs, juste contre partie aux efforts demandés à ceux-ci dans le sens d’un accroissement de la quantité de fruits obtenus et d’une amélioration et adaptation de la qualité.

  • De multiples moyens étaient déployés à ces fins :
    • participation aux congrès nationaux et internationaux ayant trait à la production et au commerce des fruits,
    • envoi de missions d’étude dans les régions fruitières extérieures au Réseau et dans les pays étrangers,
    • expositions, où les fruits des provinces du PLM et du Réseau algérien étaient associés à leurs fleurs, à leurs légumes de primeurs et à leurs autres produits agricoles, vins de notre Bourgogne, huiles de notre Provence, etc...

C’est ainsi qu’ont été développés ou gagnés au bénéfice de nos producteurs les marchés étrangers (Angleterre, Europe centrale), où nos concurrents italiens et espagnols déploient cependant une très grande activité.

  • Enfin, pour assurer la liaison entre l’offre et la demande, notre Compagnie mettait au point le transport accéléré des fruits en même temps que des primeurs et des fleurs utilisation de wagons spéciaux, organisation de ramassages, mise en marche de trains à grande vitesse, etc... C’est ainsi que les produits de la Basse-Durance mettent désormais
    • moins de vingt-trois heures pour venir d’Avignon à Paris,
    • moins de quarante-huit heures pour atteindre Londres,
    • à peine plus de quarante et une heures et de soixante-cinq heures pour gagner respectivement Francfort et Berlin,
    • centres que certains trains placent même à 33 h 20’ et 53 h 20’ environ d’Avignon.

Ces transports accélérés permettent d’amener nos fruits, comme nos fleurs et légumes, dans un état de fraîcheur qui les fait remarquer entre tous, en dehors même de leur qualité intrinsèque, sur les marchés en question.

Les mesures déjà prises pour développer le trafic des fruits et primeurs du Réseau ne sont d’ailleurs qu’une étape, puisque 1 550 nouveaux wagons à primeurs vont être prochainement mis en service et que l’application du froid sera généralisée.

En effet, on étudie actuellement la création d’une gare frigorifique à Avignon, centre de la production fruitière et maraîchère, et de wagons frigorifiques spécialement aménagés pour le transport aux très grandes distances des produits périssables.