6 juin 1933, accident de travail, près Charenton

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Circonstances de l’accident

Une horrible tragédie se déroule le 6 juin 1933 à la sortie de Paris. Les deux hommes de l'équipe de conduite du train Express 417, Paris-Montereau, périssent brûlés. Ce n'est que grâce au courage du chef de train que le convoi fou, sans plus personne aux commandes, a pu être stoppé.


  • Un mécanicien du P.-L.-M. meurt carbonisé.

Hier, à 21 heures 30, le mécanicien du train 417 P.-L.-M., allant jusqu'à Moulins, a eu les vêtements enflammés. Il s'est jeté sur la voie, en face du port de Charenton. Mais un train qui venait en sens inverse lui a sectionné le bras. On a retrouvé son corps affreusement carbonisé.

Journal L'Intransigeant du 6-6-1933 (Collection BNF Gallica).


  • LA TRAGÉDIE DE LA LOCOMOTIVE DU TRAIN 417

Le sang-froid du chef de convoi Puget a évité une véritable catastrophe.

L’effroyable tragédie qui s’est déroulée, hier à 21 h. 35, à bord de la locomitive de l'express de Paris-Montereau a été l’objet d’une enquête approfondie. Ses résultats ont confirmé les premières déclarations de M. Marius Puget, le chef du train, demeurant à Alfortville, 108, rue Véras, dont l'admirable sang-froid évita une véritable catastrophe. On sait que, bondé de voyageurs, l’express 417 avait quitté la gare de Lyon à 21 h. 25, se dirigeant sur Montereau, qu’il devait atteindrez 22 h. 6. Près du fort de Charenton, à la hauteur du kilomètre 5,700, M. Marius Puget constata brusquement que le convoi poursuivait sa marche de façon anormale. autant sur les toits des wagons, il parvint à atteindre la locomotive. Sur la plateforme de Coquelle le corps du chauffeur Désiré Quence, demeurant à Montereau, 8, rue Paul-Delair, achevait de brûler au milieu d’un véritable brasier. M. Puget fit aussitôt fonctionner les freins de secours, et parvint à arrêter le convoi en gare de Villeneuve-Saint-Georges. Des recherches aussitôt entreprises permirent de découvrir le cadavre du mécanicien, Terrouar, demeurant aussi à Montereau, qui gisait sur la voie, près du kilomètre 5,600. Les corps des deux malheureux furent transportés à la morgue de Villeneuve-Saint-Georges. L’enquête menée de concert par MM. Manche, sous-inspecteur de la traction du réseau du P. L. M., Vicq et Danoix, commissaire de police de Charenton et de Villeneuve-Saint-Georges, permit de reconstituer l’horrible, drame. Le « gueulard » de la chaudière mesure 45 centimètres de diamètre. En enfournant une pelletée de charbon, les vêtements du chauffeur Quence, imprégnés de graisse et d'huile, peut-être de pétrole provenant du bidon destiné au remplissage des lampes du train, se seraient brusquement enflammés sous l’action d’un violent retour de flamme. Bientôt transformé à son tour en une torche vivante, le mécanicien Terranar se jeta à bas de la machine à l’instant même où un train croisait son propre convoi. Tamponné au vol par la locomotive, le mécanicien fut violemment projeté sur les rails, et les, roues de la machine lui sectionnèrent le bras. La mort fut instantanée. Cependant, le chauffeur Quence essayait de gagner la cuve d’eau située sur le côté droit de la machine. Au passage d’un tunnel, il eut le crâne fracturé et c’est le corps d’un mort que les flammes achevèrent de consumer. Les enquêteurs ont soigneusement examiné la machine qu’ils ont trouvé en parfait état de marche.

On frémit à la pensée de la catastrophe qui aurait pu suivre la tragédie qui se déroula, l'autre nuit, à bord de la locomotive folle du train de Paris-Montereau. Mais qui expliquera jamais ce drame épouvantable? Les deux acteurs sont morts de la façon la plus affreuse. Et ceci remet en mémoire certains accidents du même genre qui sont demeurés enveloppé de mystère. On pense aussi aux troublants navires qui sont parfois croisés, au large, sans commandement ni équipage. Y aurait-il des "trains aveugles"?


Journal L'Intransigeant du 7-6-1933 (Collection BNF Gallica).


  • DEUX CHEMINOTS BRULÉS VIFS SUR UNE LOCOMOTIVE.

Les causes? Le "feu vert", la marche tender en avant, la rationalisation criminelle de la compagnie P.-L.-M.

Il était, 21 h. 30, lundi soir. Trois passants, trois banlieusards de Maisons-Alfort, qui se trouvaient sur le pont-passerelle du Km. 5,300, virent, épouvantes, un homme transformé en torche vivante se débattant sur la caisse à charbon d'une locomotive qui, roulant tender en avant, tirait un train de voyageurs venant de Paris et se dirigeant à toute vapeur vers Villeneuve-Saint-Georges. Horrifiés, les trois hommes de la passerelle, virent en un éclair la tête de l'homme-torche heurter la passerelle et s'écrouler sur le charbon. Quelques minutes plus tard, à 400 mètres plus loin, un habitant de Maisons-Alfort, M. Paul Bezault, qui, la nuit tombant, revenait de son jardin par le chemin latéral, et longeait la voie ferrée du P.-L.-M., vit, sur 1es rails, quelque chose qui brûlait. S'approchant il distingua mieux un nomme. Se précipitant à travers les rails il s'approcha de la torche humaine étendue et dont la. moitié supérieure du corps brûlait, enleva sa chemise, la déchirant pour éteindre l'atroce feu. Mais à ce moment, sur la même voie, un train arrivait. Vite, le sauveteur tenta de dégager le malheureux, mais celui-ci (un corps d'athlète) était trop lourd. Pour ne pas être broyé, M. Bezault dut reculer. Lorsqu'il revint, en compagnie d'autres personnes alarmées, un bras de l'homme-torche était séparé du tronc, sectionné par les roues du train croiseur. Des cheminots vinrent; Ils reconnurent dans le corps mutilé et tout fumant un de leurs camarades, le mécanicien Léon Terroir, 45 ans, du dépôt de Montereau. Le corps du malheureux, la face défigurée, le crâne béant, les yeux crevés et le torse et le ventre brûlés, fut transporté à la Morgue du commissariat de Charenton.

Une odeur de chair grillée

Au kilomètre six le chef de train Puget, dans son fourgon du « direct Paris-Montereau qui part de Paris à 21 h. 19, se tenait à la portière de son wagon. Il remarqua que le train ralentissait de plus en plus, même après la traversée de Maisons-Alfort où un ralentissement à 60 était prévu. Que se passait-il ? Se penchant, il sentit une odeur de chair grillée. Peu après, vers le Km. 8, il distinguait une lueur étrange au-dessus de la locomotive. Cela devenait de plus en plus anormal. De son fourgon, il freina. Peu après le train s'arrêtait, un peu avant Villeneuve-Saint-Georges, en face du village de Pompadour. Aussitôt, le chef de train Puget sautait sur la plate-forme de la locomotive et la trouvait vide. Ni mécanicien, ni chauffeur. La porte mobile du foyer, était entr'ouverte, le grand, pique-feu "à côté. Des morceaux de cervelle étaient épars. Intrigué par la lueur, il monta sur la machine et trouva un homme étendu au-dessus des soupapes. C'était le chauffeur, Désiré Quence, 27 ans, de Montereau. Son crâne était broyé, et le bas du corps était brûlé et ses chaussettes flambaient encore. Aidés d'un voyageur, ils descendirent le corps, et à l'aide d'un seau d'eau éteignirent le feu qui achevait de consumer le malheureux qui fut transporté à la Morgue de Villeneuve. Avec une machine de réserve le train qui roula quelques kilomètres sans conducteur et où seuls la vigilance et le sang-froid du chef de train évita une effroyable catastrophe, repartit pour Montereau, tandis que la machine sanglante était mise sous scellés. A Melun, la femme du mécanicien brûlé vif attendait son mari.

Le crime

Hier après-midi, près de la gare de Lyon, l'effervescence était grande parmi les rudes hommes en costume bleu, à la figure noire de charbon les mécaniciens et les chauffeurs du P.-L.-M.. Nous avons causé avec eux. Certains connaissaient bien les malheureux Terroir et Quence. Nous avons parlé avec tous. Quelles sont les causes de l'effroyable tragédie du "train fou", du direct Paris-Montereau? Et voici ce qu'ils nous ont dit, affirmé. ̃Terroir et Quence sont arrivés à la gare de Lyon avec le train omnibus 432, à 20 h. 13. Ils sont repartis avec le 417, et à 21 h. 19, c'est-à-dire une heure après. Pendant ce temps-là, il a fallu qu'ils préparent leur machine, qu'ils rapprochent le charbon, remplissent les caisses eau et enfin refassent un feu neuf.

le "feu vert"

Manquant du temps matériel pour que le charbon flambe entièrement au moment du départ, ils sont partis, comme nous disons, avec un « feu vert ». Tous les cheminots vous diront que ceci est très dangereux. Une machine qui part avec un plein foyer de charbon pas allumé et il en faut, car le train ne doit mettre que 40 minutes pour Paris-Montereau et de briquettes dans le même état de demi-combustion est un danger. -Pourquoi-? Parce que les émanations de gaz qui s'en dégagent sont bien plus grandes. Tout le monde connaît l'effet que produit une cuisinière ou une salamandre lorsqu'on l'ouvre pendant que le charbon "prend". Ça fait une sorte d'explosion et une flamme jaillit. Le même effet se produit pour nous. Et pour nous, ça ne fait pas de doute, sur la loco du 417, le gaz qui s'est accumulé par suite du « feu vert » a produit une explosion au moment où le chauffeur a entr'ouvert la porte du foyer pour y introduire le pique-feu. Une langue de flamme a brûlé le chauffeur et en même temps, certainement, le mécanicien! On sait que ce dernier avait les yeux complètement brûlés, Il a dû être aveuglé littéralement de suite, et instinctivement, a actionne par réflexe tout de suite le régulateur pour ralentir, comme ce qu'on fait instinctivement tous, devant une catastrophe imminente. Puis, aveugle, affolé par la douleur il est monté sur la machine. C'est, lui qu'on a vu gesticuler, et se faire broyer le crâne, tomber sur la voie, tandis que le chauffeur également brûlé atrocement cherchait sans doute à atteindre les réserves d'eau et s'écroulait, le crâne fendu, sur les soupapes où on l'a retrouvé!

Le tender en avant

Mais comment expliquer que tout de suite, ils aient flambé comme des torches, avec seulement les légers vêlements qu'ils, avaient ? Ah pour ça c'est la position de la locomotive qui y est pour beaucoup et qui est cause au moins qu'il y a deux morts. Voilà. C'est toujours leur rationalisation. De même que les cheminots n'ont pas le temps de préparer le feu avant le départ, de même pour économie de temps et de personnel on ne change pas la machine, on l'attelle le tender en avant pour repartir. C'était le cas pour le 417. Et alors? Alors, d'une part, il est clair que le vent, sans obstacle dans cette position, à été le souffleur formidable qui a fait transformer en torches les deux malheureux, lesquels dans la position normale de la machine auraient été à l'abri du vent, et n'auraient eu peut-être que des brûlures graves, mais non ̃ mortelles. Autre chose. Dans la position normale de la machine, le chef de train aurait été beaucoup plus. rapproche de la plate-forme, il aurait pu beaucoup, plus tôt, s'apercevoir de la catastrophe, de la chute en admettant qu'elle se soit produite du mécanicien, arrêter le train a temps pour sauver le chauffeur. Voilà ce qu'il faut dire, continuent les cheminots qui sont là. Ce qui est la base de cet atroce accident, c'est la rationalisation criminelle de la compagnie. Économies sur le personnel, sur les « temps » comme dans les usines, et c'est la mort qui nous menace qui vient de frapper de la manière la plus atroce, deux de nos camarades qui prolongent une liste déjà longue, ajoute un autre. En quatre jours, un mécanicien, à Nevers, s'est fait couper la tête. Un autre, à Dijon, a été broyé. Un troisième, toujours à Dijon, a été grièvement blessé. Et ces deux copains là, encore. Les camarades mécaniciens et chauffeurs nous ont dit d'antres choses encore. Nous y reviendrons. Mais ceci déjà montre où sont les responsables de l'atroce tragédie du « train fou ». Les responsables ce sont les dirigeants de la compagnie P.L.M., c'est la rationalisation capitaliste de plus en plus accentuée, contre laquelle la Fédération. unitaire des cheminots et sa section fédérale du P.L.M.. mènent une bataille acharnée, action qui, devant ces nouveaux dividendes sanglants, aura l'appui de tous les cheminots exploités et menacés de mort.

Journal L'Humanité du 7-6-1933 (Collection BNF Gallica).


  • L'atroce tragédie du Paris-Montereau.

Le "feu vert" occasionne un extraordinaire et très dangereux retour de flamme affirment les camarades des deux cheminots brûlés vifs.

Dans deux petites maisons de Montereau il y a deux malheureuses femmes dont les yeux n'ont plus de larmes les compagnes de Léon Terroir et de Désiré Quence, le mécanicien et le chauffeur qui sur leur locomotive partis à feu vert et disposée tender en avant, ont brûlé vifs lundi soir entre Alfort et Villeneuve-Saint-Georges. ̃̃̃"Feu vert": gaz, accumulé, danger d'explosion, de retour de flamme terrible "Rationalisation": Tender en avant, peine plus grande, aggravation de l'insécurité rationalisation.̃̃

Deux cheminots brûlés vifs RATIONALISATION .̃̃

Rationalisation capitaliste pour les dividendes sanglants des magnats du rail! Nos camarades de la Fédération unitaire des Cheminots ont poursuivi hier leur enquête sur cet atroce accident. Elle confirme point par point les déclarations que nous avions recueillies hier. La cause de l'accident que les dirigeants de la compagnie s'efforcent de cacher, elle est là, dans cette préparation hâtive et forcée du feu, ce feu vert que connaissent bien et que craignent les cheminots. Et cela nous rappelait la phrase d'un des mécaniciens que nous avions vu la veille. ̃Les gaz, dans, ces conditions, s'accumulent, à la porte du foyer. Et soudain, dès qu'on ouvre un peu, là ce n'est pas un retour de flammes ordinaire, ça fait un jet de flammes, tenez, comme une lampe à souder, mais plus longue, plus puissante, une large et terrible langue de feu et il n'y a que le « feu vert », qui occasionne ça!

Et ceci explique bien comment a été occasionnée la mort atroce des deux mécaniciens. Les brûlures que les cadavres mutilés portent l'indiquent. Le mécanicien a eu la face brûlée terriblement, ses yeux sont carbonisés entièrement. Or, il ne s'est passé, la distance le montre, que peu de secondes entre le « retour de flammes », la chute du mécanicien et la découverte du corps. il est impossible que des brûlures ordinaires aient causé ces terribles effets en si peu de temps. C'est la langue de feu qui a atteint le visage de Terroir, lui carbonisant les yeux et la face. De là, le feu se communiqua à ses vêtements, tandis que, aveugle, fou de douleur, il grimpait sur le tender et, frappé sans doute par un pont, tombait. Tandis que le chauffeur, atteint, lui, à la partie inférieure du corps par le même et terrible jet de flamme, essayait de parvenir au réservoir d'eau et heurtait du crâne la voûte d'une passerelle. A cela s'ajoute, car cela n'aurait pas suffi à provoquer les autres brûlures, le vent violent qui activa la terrible combustion. Vent violent, comme nous le disions hier, qui n'aurait pas soufflé sur eux si la machine avait été attelée normalement et non tender en avant. A ce sujet, le chef de train Pujet qui, par son sang-froid et son courage, sauva des dizaines de voyageurs d'une mort terrible, apportait hier à nos camarades unitaires une confirmation et une précision à ce que nous écrivions. Il est certain, leur disait-il, que 1° si la machine avait été placée normalement, d'abord, le mécanicien serait tombé de mon côté à peu près sûrement, presque dans la position normale de la locomotive, il est du même côté que moi. 2° que la plate-forme se trouvant beaucoup plus près, j'aurais pu voir, étant à la portière, ce qui se passait et intervenir immédiatement. 3° que tout au moins j'aurais pu sauver la vie du malheureux Quence, le chauffeur.

D'autres dangers

Les camarades unitaires que nous avons vus n'ont pas manqué de nous souligner d'autres terribles dangers qui menacent cheminots et voyageurs et tous ayant la même cause la rationalisation criminelle des dirigeants des compagnies. Ce n'est que grâce au sang-froid du chef de train qu'une catastrophe a été évitée, et cependant il y avait deux hommes sur la machine. Mais cela. n'empêche pas la compagnie de tendre à n'y mettre qu'un seul homme. Ainsi, c'est ce qui est fait pour les rames « réversibles »: Un train arrive machine en tête, il repart sans que la machine ait été changée de place. Le chauffeur reste sur la locomotive et le mécanicien va se mettre en tête, dans le fourgon. On voit le danger aggravé qui en résulte. Il y a pire encore. Pour le Paris-Montereau, le chef de train était là. Mais sur certains parcours, on supprime le chef de train. Il n'y a plus qu'un agent en queue de la rame. Suppose (et ça aurait pu être) que ce fût le cas pour le 417, une catastrophe effroyable arrivait.

Journal L'Humanité du 8-6-1933 (Collection BNF Gallica).


  • LA TRAGÉDIE DU TRAIN PARIS-MONTEREAU

De nouvelles informations confirment la responsabilité de la Compagnie P.L.M.

La presse bourgeoise, pour relater le terrible accident du train 417, s'est bien gardée de puiser ses renseignements auprès des cheminots eux-mêmes. Elle a publié les hypothèses intéressées des dirigeants de la Compagnie P.-L.-M., essayant de dégager leur responsabilité écrasante. Et depuis que l'Humanité, puisant ses informations chez les cheminots eux-mêmes, a apporté la relation exacte des faits accusant non pas la fatalité mais les magnats rationalisateurs du rail, c'est le silence. Nous sommes en mesure d'apporter d'autres précisions qui confirment nos accusations. Deux témoins, des habitants de Maisons-Alfort en bordure de la voie, ont vu passer le train fou. Ils ont vu le mécanicien atrocement brûlé au visage descendre eu se tenant à la rampe, sur le marche-pied à droite dans le sens de la marche du train, rester là un instant, crispé. Certains témoins déclarent qu'ils ont entendu un cri atroce: Au feu! puis la douleur lui fit lâcher prise et il tomba. Ces déclarations sont importantes, en effet, c'est à droite que, le mécanicien est descendu, se trouvant à droite dans la machine tender en avant. 11 aurait été a gauche, autrement, c'est-a-dire du même côté que le chef de train qui, ainsi l'aurait vu tout de suite et aurait immédiatement arrêté le train par le robinet de vigie. Il n'y aurait pas, certainement eu la mort du chauffeur qui a été heurté plus loin par une passerelle à signaux. 11 n'y aurait peut-être pas eu la mort du mécanicien qui s'est tué en tombant et fut mutilé peu après par le train croiseur. Enfin, d'après l'examen qui a été fait de l'état de la machina par le mécanicien Grand Girard, les renseignements techniques pression a 14 kgs au lieu dé 16 (au « timbre ») lorsqu'on ferme le régulateur, faiblesse de hauteur d'eau dans le niveau d'eau prouvent que depuis le départ les deux hommes avaient dû fournir un travail surhumain pour gagner le retard qu'ils avaient au départ et qu'ils ne pouvaient rattraper après les 7 ou 8 premiers kilomètres car le temps alloué au parcours ne le permet pas. Et s'ils arrivaient en retard h Melun, c'était une retenue de plus de 10 francs. C'est dans ces conditions que le coup de pique-feu fut donné dans le foyer empli par les gaz dus au feu « vert» et ce fut l'échappement des gaz enflammés, la langue de feu qui provoqua les terribles brûlures. Ajoutons encore que du fait de la disposition de la machine et de la chute des deux malheureux, le train fut sans conducteur du kilomètre 5 au kilomètre 9. La responsabilité de la Compagnie est écrasante. Aux dépôts, mécaniciens et chauffeurs en discutent et s'en indignent. Aussi, hier, les dirigeants du P.-L.-M. faisaient courir le bruit que du haut d'une passerelle ou d'un pont, une matière inflammable était tombée, ce qui aurait provoqué le terrible incendie. Cette « explication » montre que la Compagnie se trouve à court d'argument et veut par tous les moyens dégager sa responsabilité des deux morts provoqués par sa rationalisation criminelle. Nous apprenons que le corps du chauffeur Quence va être inhumé samedi à 13 h. 30, et que le rendez-vous est devant l'église Notre-Dame de la Croix de Ménilmontant, rue d'Eupatoria à Paris (2Oe). Les cheminots se rendront là en masse pour accompagner leur camarade au cimetière et pour montrer leur volonté de mettre un frein aux dividende sanglants.

Journal L'Humanité du 9-6-1933 (Collection BNF Gallica).


Photos et cartes postales

Croquis et plans