Loi du 15 juillet 1845 (Police des chemins de fer)

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Généralités

Texte de la loi

Titre 1er : Mesures relatives à la conservation des chemins de fer

Article 1

Les chemins de fer construits ou concédée par l’Etat font partie de la grande voirie.

Article 2

Sont applicables aux chemins de fer les lois et règlements sur la grande voierie, qui ont pour objet d’assurer la conservation des fossés, talus, levées et ouvrages d’art dépendant des routes, et d’interdire, sur toute leur étendue, le pacage des bestiaux et les dépôts de terre et autres objets quelconques.

Article 3

Sont applicables aux propriétés riveraines des chemins de fer, les servitudes imposées par les lois et règlements sur la grande voirie, et qui concernent l’alignement; l’écoulement des eaux; l’occupation temporaire des terrains en cas de réparation; la distance à observer pour les plantations et l’élagage des arbres plantés; le mode d’exploitation des mines, minières, tourbières, carrières et sablières dans la zone déterminée à cet effet. Sont également applicables à la confection et à l’entretien des chemins de fer, les lois et règlements sur l’extraction des matériaux nécessaires aux travaux publics.

Article 4

Tout chemin de fer sera clos deux côtés et sur toute l’étendue de la voie. L’Administration déterminera pour chaque ligne le mode de cette clôture, et, pour ceux des chemins qui n’y ont pas été assujettis, l’époque à laquelle elle devra être effectuée. Partout où les chemins de fer croiseront de niveau les routes de terre, des barrières seront établies et tenues fermées, conformément aux règlements.

Article 5

A l’avenir, aucune construction autre qu’au mur de clôture ne pourra être établie dans une distance de deux mètres d’un chemin de fer. Cette distance sera mesurée soit de l’arête supérieure du déblai, soit de l’arête inférieure du talus du remblai, soit du bord extérieur des fossés du chemin, et, à défaut, d’une ligne tracée, à 1,5 mètre à partir des rails extérieurs de la voie de fer. Les constructions existantes au moment de la promulgation de la présente loi, ou lors de l’établissement d’un nouveau chemin de fer, pourront être entretenues dans l’état où elle. se trouveront à cette époque. Un règlement d’administration publique déterminera les formalités à remplir par le. Propriétaire pour faire constater l’état desdites constructions, et fixera le délai dans lequel ces formalités devront être remplies.

Article 6

Dans les localités où le chemin de fer se trouvera en remblai de plus de trois mètres au-dessus du terrain naturel, il est interdit aux riverains de pratiquer, sans autorisation préalable, des excavations dans une zone de largeur égale à la hauteur verticale du remblai, mesurée à partir du pied du talus. Cette autorisation ne pourra être accordée sans que les concessionnaires ou fermiers de l’exploitation du chemin de fer aient été entendus ou dûment appelés.

Article 7

Il est défendu d’établir, à une distance de moins de 20 mètres d’un chemin de fer desservi par des machines à feu, des couvertures en chaume, des meules de paille, de foin, et aucun autre dépôt de matières inflammables. Cette prohibition ne s’étend pas aux dépôts de récoltes faits seulement pour le temps de la moisson.

Article 8

Dans une distance de moins de cinq mètres d’un chemin de fer, aucun dépôt de pierres ou d’objets non inflammables, ne pont être établi sans l’autorisation préalable du Préfet. Cette autorisation sera toujours révocable.

  • L’autorisation n’est pas nécessaire:
    • pour former dans les localités où le chemin de fer est en remblai, des dépôts de matières non inflammables, dont la hauteur n’excède pas celle du remblai du chemin;
    • pour former des dépôts temporaires d’engrais et autres objets nécessaires à la culture des terres.

Article 9

Lorsque la sûreté publique, la conservation du chemin et la disposition des lieux le permettront, les distances déterminées par les articles précédents pourront être diminuées en vertu d’ordonnances royales rendues après enquête.

Article 10

Si, hors des cas d’urgence prévus par la loi des 16-24 août 1790, la sûreté publique ou la conservation du chemin de fer l’exige, l’Administration pourra faire supprimer, moyennant une juste indemnité, les constructions, plantations, excavations, couvertures en chaume, amas de matériaux combustibles ou autres, existant dans les zones ci-dessus spécifiées, au moment de la promulgation de la présente loi, et, pour l’avenir, lors de l’établissement d’un chemin de fer. L’indemnité sera réglée, pour la suppression des constructions, conformément aux Titres IV et suivants de la loi du 3 mai 1841, et, pour tous les autres cas, conformément à la loi du 16 septembre 1807.

Article 11

Les contraventions aux dispositions un présent Titre seront constatées, poursuivie et réprimées somme en matière de grande voirie. Elles seront punies d’une amende de 16 à 300 francs, sans préjudice, s’il y a lieu, des peines portées au Code pénal et au Titre III de la présente loi. Les contrevenants seront, en outre, condamnés à supprimer, dans le délai déterminé par l’arrêté du conseil de préfecture, les excavations, couvertures, meules ou dépôts faits contrairement aux dispositions précédentes. A défaut, par eux, de satisfaire à cette condamnation dans le délai fixé, la suppression aura lieu d’office, et le montant de la dépense sera recouvré contre eux, par voie de contrainte, comme en matières de contributions publiques.

Titre II : Des contraventions de voierie commises par les concessionnaires ou fermiers de chemin de fer

Article 12

Lorsque le concessionnaire ou le fermier de l’exploitation d’un chemin de fer contreviendra aux clauses du cahier des charges, ou aux décisions rendues en exécution de ces clauses, en ce qui concerne le service de la navigation, la viabilité des routes royales, départementales et vicinales, ou le libre écoulement des eaux, procès-verbal sera dressé de la contravention, soit par les ingénieurs des Ponts et chaussées ou des mines, soit par les conducteurs, gardes mines et piqueurs, dûment assermentés.

Article 13

Les procès verbaux, dans les 15 jours de leur date, seront notifiés administrativement au domicile élu par le concessionnaire ou le fermier, à la diligence du préfet, et transmis dans le même délai au conseil de préfecture du lieu de la contravention.

Article 14

Les contraventions prévues à l’article 12 seront punies d’une amende de 300 à 3 000 francs.

Article 15

L’Administration pourra, d’ailleurs, prendre immédiatement toutes mesures provisoires pour faire cesser le dommage, ainsi qu’il est procédé en matière de grande voirie. Les frais qu’entraînera l’exécution des mesures seront recouvrés contre le concessionnaire ou fermier par la voie de contrainte, comme en matière de contributions publiques.

Titre III : Des mesures relatives à la sûreté de la circulation sur les chemins de fer

Article 16

Quiconque aura volontairement détruit ou dérangé la voie de fer, placé sur la voie un objet faisant obstacle à la circulation, ou employé un moyen quelconque pour entraver la marche des convois ou les faire sortir des rails, sera puni de la réclusion. S’il y a eu homicide ou blessures, le coupable sera, dams le premier cas, puni de mort, et, dans le second, de la peine des travaux forcés à temps.

Article 17

Si le crime prévu par l’article 16 a été commis en réunion séditieuse, avec rébellion ou pillage, il sera imputable aux chefs, auteurs, instigateurs et provocateurs de ces réunions, qui seront punis comme coupables du crime et condamnés aux mêmes peines que ceux qui l’auront personnellement commis, lors même que la réunion séditieuse n’aurait pas eu pour but direct et principal la destruction de la voie de fer. Toutefois, dans ce dernier cas, lors que la peine de mort sera applicable aux auteurs du crime, elle sera remplacée, à l’égard des chefs, auteurs, instigateurs et provocateurs de ces réunions, par la peine des travaux forcés à perpétuité.

Article 18

Quiconque aura menacé, par écrit anonyme ou signé, de commettre un des crimes prévus par l’article 16, sera puni d’un emprisonnement de 3 à 5 ans, dans le cas ou la menace aurait été faite avec ordre de déposer une somme d’argent dans un lieu indiqué, ou de remplir toute autre condition. Si la menace n’a été accompagnée d’aucun ordre ou condition, la peine sera d’un emprisonnement de 3 mois à 2 ans, et d’une amende de 100 à 500 francs. Si la menace avec ordre ou condition a été verbale, le coupable sera puni d’un emprisonnement de 15 jours à 6 mois, et d’une amende de 25 à 300 francs. Dans tous les cas, le coupable pourra être mis, par le jugement, sous la surveillance de la hante police, pour un temps qui ne pourra être moindre de 2 ans ni excéder 5 ans.

Article 19

Quiconque, par maladresse, imprudence, inattention, négligence ou inobservation des lois ou règlements, aura involontairement causé sur un chemin de fer, ou dans les gares ou stations, un accident qui aura occasionné des blessures, sera puni de 8 jours à 6 mois d’emprisonnement, et d’une amende de 50 à 1 000 francs. Si l’accident a occasionné la mort d’une ou de plusieurs personnes, l’emprisonnement sera de 6 mois à 5 ans, et l’amende de 300 à 3 000 francs.

Article 20

Sera puni d’un emprisonnement de 6 mois à 2 ans, tout mécanicien ou conducteur garde-frein qui aura abandonné son poste pendant la marche du convoi.

Article 21

Toute contravention aux ordonnances royales portant règlement d’administration publique sur la police, la sûreté et l’exploitation du chemin de fer, et aux arrêtés pris par les préfets, sous l’approbation du ministre des travaux publics, pour l’exécution desdites ordonnances, sera punie d’une amende de 16 à 3000 francs. En cas de récidive dans l’année, l’amende sera portée au double, et le tribunal pourra, selon les circonstances, prononcer, en outre, un emprisonnement de 3 jours à un mois.

Article 22

Les concessionnaires ou fermiers d’un chemin de fer seront responsables, soit envers l’Etat, soit envers les particuliers, du dommage causé par les administrateurs, directeurs ou employés à un titre quelconque au service de l’exploitation du chemin de fer. L’État sera soumis à la même responsabilité envers les particuliers, si le chemin de fer est exploité à ses frais et pour son compte.

Article 23

Les crimes, délits on contraventions prévus dans les Titres Ier et IIIème de la présente loi, pourront être constatés par des procès verbaux dressés concurremment par les officiers de police judiciaire, les ingénieurs des Ponts et chaussées et des mines, les conducteurs, gardes mines, agents de surveillance et gardes nommés ou agréés par l’Administration et dûment assermentés. Les procès verbaux des délits et contraventions feront foi jusqu’à preuve contraire. Au moyen du serment prêté devant le tribunal de première instance de leur domicile, les agents de surveillance de l’Administration et des concessionnaires ou fermiers, pourront verbaliser sur toute la ligne du chemin de fer auquel ils seront attachés.

Article 24

Les procès-verbaux dressés en vertu de l’article précédent, seront visés pour timbre et enregistrés en débet. Ceux qui auront été dressés par des agents de surveillance et gardes assermentés, devront être affirmés dans les trois jour, à peine de nullité, devant le juge de paix ou le maire, soit du lieu du délit ou de la contravention, soit de la résidence de l’agent.

Article 25

Toute attaque, toute résistance avec violence et voie de fait envers les agents de chemins de fer, dans l’exercice de leurs fonctions, sera puni des peines appliquées à la rébellion, suivant les distinctions faites par le Code pénal.

Article 26

L’article 463 du Code pénal est applicable aux condamnations qui seront prononcées en exécution de la présente loi.

Article 27

En cas de conviction de plusieurs crimes ou délits prévus par la présente loi ou par le Code pénal, la peine la plus forte sera seule prononcée. Les peines encourues pour des faits postérieurs à la poursuite, pourront être cumulées sans préjudice des peines de la récidive.